En signe d'apaisement après une violente brouille, le chef historique de l'extrême droite française Jean-Marie Le Pen s'est plié lundi à la volonté de sa fille Marine, en renonçant à se présenter à un scrutin local, tout en adoubant sa petite-fille pour le remplacer.

Le cofondateur du Front national a tiré les conséquences de la crise suscitée par ses récents propos sur la Shoah et l'immigration, qui ont mis à mal la stratégie de «dédiabolisation» menée par Marine Le Pen depuis son arrivée à la tête du parti en 2011.

Le vieux tribun, 86 ans, a jeté l'éponge dans Le Figaro Magazine lundi matin, tout en continuant à assurer qu'il était «le meilleur candidat pour le Front national». Toujours bravache, il a ensuite regretté, dans un communiqué, le «hourvari» (vacarme) autour de ses déclarations.

Pour mener à sa place la liste FN dans la région Provence-Alpes Côte d'Azur (sud), l'eurodéputé a estimé que sa petite-fille, Marion Maréchal-Le Pen, 25 ans, déjà élue députée dans la région, ferait un «excellent» candidat.

La jeune femme, nièce de Marine, a rapidement fait savoir qu'elle allait relever le gant. «Elle y va», a assuré à l'AFP son conseiller en communication, Arnaud Stéphan.

Le 2 avril, Jean-Marie Le Pen a suscité une levée de boucliers en répétant des propos sur les chambres à gaz «détails de l'histoire», qui lui ont déjà valu d'être condamné en justice.

Quelques jours plus tard, le patriarche enfonçait le clou en défendant le maréchal Philippe Pétain, chef de l'État français sous l'occupation allemande (1940-44) et artisan de la collaboration avec le régime nazi, et en insistant sur la nécessité de «sauver l'Europe boréale et le monde blanc».

Dénonçant «un suicide politique», sa fille Marine l'avait accusé d'avoir créé une «crise sans précédent» pour le parti. Elle avait jugé qu'il serait «sage» de la part de son père de se retirer de la campagne des régionales, tout en engageant contre lui une procédure disciplinaire.

«Triste Guignol»

Le retrait du «menhir» - surnom de Jean-Marie Le Pen lié à ses origines bretonnes - est donc «un signe d'apaisement», a jugé le député proche du FN Gilbert Collard. «C'est la preuve qu'il a entendu l'appel à la sagesse lancé avec dignité, fermeté et une évidente souffrance» par sa fille, a ajouté ce proche de Marine Le Pen.

L'octogénaire a pris une «décision très sage», mais elle ne devrait pas empêcher le bureau exécutif du parti de se réunir «en formation disciplinaire», probablement à la fin du mois, a pour sa part commenté le vice-président du FN Florian Philippot.

En attendant, le bureau politique du FN devrait se prononcer vendredi sur la candidature de Marion Maréchal-Le Pen dans le sud-est. Son investiture renforcerait la position de la jeune femme, très populaire auprès des militants.

La benjamine du Parlement français est plus conservatrice sur les questions de société que sa tante et plus libérale économiquement.

Si elle se jette dans la course, elle devra peut-être affronter... un proche de son grand-père : l'eurodéputé Bruno Gollnisch qui «envisage» d'être candidat à l'investiture du FN dans le sud-est.

«Dans l'intérêt supérieur de la France», Jean-Marie Le Pen a toutefois demandé à son «ami» de soutenir la candidature de sa petite-fille.

Cet adoubement a suscité l'ironie des adversaires du FN. L'opposition de droite a comparé cet épisode à la série Dallas, tandis que le Parti socialiste au pouvoir évoquait un «triste Guignol».

Depuis qu'elle a succédé à son père à la tête du FN en 2011, Marine Le Pen cherche à débarrasser le parti de son image sulfureuse. Aidée par une abstention croissante, elle a engrangé depuis deux ans des succès électoraux et espère figurer au second tour de l'élection présidentielle de 2017. Les régionales de décembre seront le dernier grand scrutin en France avant cette échéance.