Le fondateur du Front national Jean-Marie Le Pen a défié vendredi sa fille, l'actuelle présidente du parti d'extrême droite qui veut le pousser vers la sortie après des déclarations provocatrices du vieux tribun, alors que la justice s'intéresse de près aux finances du FN.

«J'irai me défendre, évidemment et probablement attaquer», a lancé Jean-Marie Le Pen après l'annonce par Marine Le Pen de «l'ouverture d'une procédure disciplinaire» contre son père, qu'elle a appelé à «faire preuve de sagesse» et à «arrêter ses responsabilités politiques».

Le président d'honneur du FN, âgé de 86 ans, devrait être convoqué devant le bureau exécutif du parti - dont il est membre - en formation disciplinaire d'ici la fin avril.

Une guerre ouverte oppose depuis quelques jours M. Le Pen à sa fille après de récents propos du fondateur qualifiés de «provocations» et de «suicide politique» par cette dernière.

«Mme Le Pen est en train de dynamiter sa propre formation (...) Ce n'est pas moi, c'est elle qui se suicide, c'est elle qui se tire une balle dans le pied», a réagi le tribun d'extrême droite, se disant «pantois», «médusé» devant la réaction de sa fille.

Engagée dans une entreprise de «dédiabolisation» du FN, Marine Le Pen a très mal accueilli de récentes déclarations de son père, hostile à ce choix politique.

Adepte des provocations, Jean-Marie Le Pen a réitéré la semaine dernière des propos sur les chambres à gaz «détail» de l'histoire de la Seconde Guerre mondiale, qui lui ont déjà valu une condamnation en justice. Puis il a pris ces derniers jours la défense du maréchal Philippe Pétain, artisan de la collaboration avec l'Allemagne nazie, dans un entretien-fleuve à l'hebdomadaire d'extrême droite Rivarol.

Florian Philippot, vice-président du FN et bête noire de M. Le Pen, a de nouveau appelé à sa démission vendredi.

«Peut-être qu'il faut avoir la sagesse de savoir partir (...) quand on crée un trouble aussi profond», a-t-il estimé en assurant que Jean-Marie Le Pen ne serait pas investi par son parti aux élections régionales de décembre.

Autre vice-président, Louis Aliot, s'est toutefois déclaré hostile à un départ forcé du patriarche.

«Je ne suis pas favorable à une exclusion», a-t-il dit, tout en qualifiant M. Le Pen d'«anarchiste» qui «n'a aucune limite».

«Je tiens compte du travail effectué, de tout ce qu'il a apporté au Front national», a dit l'élu, qui partage la vie de Marine Le Pen. «La vie de Jean-Marie Le Pen s'est faite au service de son pays».

Selon un sondage Harris Interactive publié vendredi, les Français semblent tourner la page de Jean-Marie Le Pen:  moins de la moitié (43 %) pensent qu'il incarne bien le Front national, contre 82 % pour sa fille.

Les sympathisants FN sont encore plus tranchés (respectivement 28 % et 99 %).

«Raciste», «provocateur», «vieux» sont les mots qui viennent spontanément à l'esprit des Français interrogés pour définir Jean-Marie Le Pen.

Ce bras de fer familial survient au moment où une enquête judiciaire concernant le financement des campagnes électorales du FN s'est accélérée avec la mise en examen d'un proche de Marine Le Pen, Frédéric Chatillon, pour financement illégal de parti politique.

La justice française a par ailleurs ouvert une enquête en mars sur des soupçons d'irrégularités dans l'emploi et la rémunération des assistants des eurodéputés du FN, qui avait remporté les élections européennes en mai 2014.