Un supposé parti-pris secret de la chef de file des nationalistes écossais Nicola Sturgeon pour le conservateur britannique David Cameron a suscité la polémique samedi malgré des démentis de sources officielles écossaise et française, et l'indignation du chef de l'opposition travailliste.

L'ambassade de France a démenti samedi à l'AFP l'affirmation du Daily Telegraph selon laquelle Nicola Sturgeon, qui est aussi première ministre d'Écosse, aurait dit à l'ambassadeur sa préférence pour une reconduction de David Cameron à Downing Street lors des législatives du 7 mai, alors qu'elle est censée être proche des travaillistes.

«L'ambassadeur a rencontré Nicola Sturgeon fin février, elles ont discuté de nombreux sujets, principalement des coopérations pratiques franco-écossaises. Bien sûr la situation politique a été évoquée mais en revanche la question des préférences politiques personnelles de Mme Sturgeon n'a pas été évoquée», a déclaré à l'AFP un porte-parole de l'ambassade de France à Londres.

Le Daily Telegraph, quotidien conservateur britannique, a affirmé en une de son édition de samedi que Nicola Sturgeon avait déclaré à l'ambassadrice Sylvie Bermann «voir plutôt» une victoire de David Cameron aux législatives qui ont lieu dans un mois parce qu'Ed Miliband n'a pas «l'étoffe d'un premier ministre».

Nicola Sturgeon a également démenti avoir tenu ces propos, affirmant qu'ils étaient «catégoriquement et à 100 % faux». Elle a appelé sur Sky News à l'ouverture d'une enquête sur ce que la chaîne TV présente comme le «Frenchgate» et que d'autres médias qualifient de «Nickileaks».

Cet appel a été entendu par le plus haut fonctionnaire du Royaume-Uni, Jeremy Heywood, qui a ordonné samedi après-midi l'ouverture d'investigations pour déterminer comment ces informations avaient pu fuiter dans le Daily Telegraph.

Selon le quotidien conservateur, le récit refléterait le compte-rendu des discussions faites par le consul général de France en Écosse, Pierre-Alain Coffinier à un fonctionnaire britannique, comme c'est l'usage lorsqu'un ambassadeur se déplace dans une région du Royaume-Uni.

Le journal affirme citer le mémo rédigé par le fonctionnaire britannique sur ces échanges.

Pierre-Alain Coffinier a également démenti à l'AFP avoir rapporté de tels propos dans son compte-rendu.

«Le vrai problème est de savoir comment un compte-rendu incorrect et de seconde main de cette rencontre - à laquelle le gouvernement britannique n'a pas assistée - a pu être écrit par un fonctionnaire du gouvernement et ensuite transmis à un journal soutenant les conservateurs au moment du lancement de la campagne des élections générales», s'est interrogée Nicola Sturgeon.

«Je pense que ces déclarations sont accablantes», a cependant réagi le chef du parti travailliste Ed Miliband, qui a exclu de former un gouvernement de coalition avec le Parti national écossais (SNP) mais envisage une alliance ou un soutien ponctuel.

Le SNP, très populaire, est susceptible de ravir une quarantaine de sièges au Labour en Écosse.

Ces déclarations «montrent qu'en public le SNP affirme ne pas vouloir d'un nouveau gouvernement conservateur, mais qu'en privé il dit en vouloir un», a ajouté M. Miliband, appelant les électeurs qui ne veulent plus des conservateurs au pouvoir «à voter Labour».

Nicola Sturgeon a répété au fil de la campagne vouloir «chasser les conservateurs» de Downing Street. Cette fervente partisane de l'indépendance de l'Écosse malgré la défaite au référendum de septembre sur le sujet, a été présentée par les sondages et les analystes comme l'un des vainqueurs du débat politique à sept qui a eu lieu jeudi soir.

Samedi, le Times titrait que «le triomphe de Sturgeon [lors du débat] avait placé le Labour dans la tourmente» quand le Daily Mail la présentait comme «la femme la plus dangereuse de Grande-Bretagne».