Trois jours après avoir été conforté dans sa stratégie de reconquête du pouvoir par des élections locales, l'ex-président français Nicolas Sarkozy a été entendu mercredi par des juges qui lui réclamaient des explications sur ses comptes de campagne de 2012.

À l'issue de cette audition, l'ancien président de droite a été placé sous le statut de témoin assisté, échappant à ce stade à une mise en examen (inculpation) dans cette enquête ouverte pour abus de confiance, tout en n'en ayant pas fini avec la justice.

Le statut de témoin assisté est intermédiaire entre celui de témoin simple et de mis en examen.

Au même instant trois proches de M. Sarkozy étaient en garde à vue dans un autre volet concernant ces mêmes comptes de campagne.

L'enquête dans laquelle a été entendu M. Sarkozy porte sur le paiement par son parti, l'UMP, fin octobre 2013, des sanctions qui lui avaient été infligées personnellement pour avoir dépassé les dépenses autorisées pour une campagne présidentielle (22,5 millions d'euros ou 30,7 millions CAN).

Dans ce dossier, l'ex-patron de l'UMP Jean-François Copé et l'ex-trésorière du parti Catherine Vautrin ont déjà été mis en examen pour abus de confiance.

L'ancien directeur de campagne de M. Sarkozy et deux autres personnes étaient interrogés, eux, par les policiers anticorruption dans l'affaire Bygmalion, du nom d'une société de communication soupçonnée d'avoir accepté de facturer à l'UMP des frais engagés pour la campagne de l'ex-président, pour un montant colossal de 18,5 millions d'euros (25,2 millions de dollars CAN). Sept personnes sont déjà mises en examen dans ce dossier

Ces épisodes judiciaires interviennent alors que Nicolas Sarkozy a été conforté dimanche dans ses ambitions de reconquête du pouvoir en 2017 avec les excellents résultats de la droite aux élections départementales pour lesquelles il s'est beaucoup investi.

L'UMP, dont il a obtenu la présidence, et ses alliés centristes sont désormais la première force politique du pays, devant l'extrême droite qui espérait arriver en tête, et loin devant le parti socialiste du président François Hollande.

«L'alternance est en marche, rien ne l'arrêtera», a clamé M. Sarkozy, qui s'est attribué le mérite de ces bons résultats.

«bon droit»

Son principal rival à l'UMP, l'ancien ministre des Affaires étrangères Alain Juppé, en a pris acte tout en soulignant que ces élections confortaient la stratégie d'alliance avec le centre dont il s'est fait le champion. M. Juppé, qui critique la ligne très droitière adoptée par M. Sarkozy pour faire concurrence à l'extrême droite, a assuré qu'il irait «jusqu'au bout» de son objectif d'être le candidat de la droite en 2017.

Et les affaires judiciaires dans lesquelles Nicolas Sarkozy ou des proches sont impliqués - huit au total - jettent une ombre sur la suite du parcours de l'ancien président.

Il a été mis en examen en juillet 2014 pour corruption, soupçonné d'avoir tenté d'obtenir auprès d'un haut magistrat des informations couvertes par le secret dans un dossier concernant la milliardaire Liliane Bettencourt.

Des juges enquêtent par ailleurs sur des accusations, non étayées par des preuves, de financement de sa campagne présidentielle victorieuse de 2007 par la Libye de Mouammar Kadhafi.

Un proche de Nicolas Sarkozy, l'ancien ministre de l'Intérieur Claude Guéant, a été mis en examen en marge de ce dossier. Son fils, François Guéant, qui avait été placé en garde à vue lundi matin, en est ressorti mercredi sans avoir été lui-même mis en examen.

Une autre enquête embarrassante pour l'ancien président concerne un arbitrage contesté ayant accordé en 2008 avec l'aval des autorités politiques 403 millions d'euros à l'homme d'affaires Bernard Tapie pour régler un  litige avec le Crédit lyonnais sur la revente de la société Adidas.

L'ex-ministre de l'Économie de Nicolas Sarkozy, Christine Lagarde, aujourd'hui directrice générale du FMI, a été mise en examen pour négligence par la Cour de justice de la République (CJR).

Cet arbitrage a été cassé par la justice.

Alain Juppé a souhaité mercredi que M. Sarkozy fasse «prévaloir son bon droit». «Je n'ai pas de jugement à porter sur la manière dont fonctionne la justice», a-t-il commenté.