«Bunga-Bunga pour tout le monde»: Silvio Berlusconi définitivement acquitté dans l'affaire Rubygate veut croire à son retour sur le devant de la scène politique mais bien peu en Italie parient sur un tel scénario.

Ces partisans ont fêté mercredi son retour à Rome, après son acquittement définitif la veille. Il a été salué par une petite foule de militants devant son domicile dans le centre de la ville éternelle. «Vous m'avez ému. Je garderai toujours ce souvenir dans mon coeur», a-t-il déclaré aux parlementaires venus également l'accueillir, selon les médias italiens, avant de plaisanter, sourire aux lèvres: «Bon, assez d'émotion, Bunga-bunga pour tout le monde!», référence aux soirées osées qui l'ont, aussi, rendu célébre dans le monde entier.

La Cour de cassation italienne a confirmé mardi soir l'acquittement de l'ancien chef de gouvernement, 78 ans, accusé d'avoir payé une prostituée mineure, «Ruby la voleuse de coeurs», pour égayer ces fameuses soirées osées.

Acquitté et totalement libre de ses faits et gestes depuis ce week-end, après avoir effectué les travaux d'intérêt général auxquels il avait été condamné pour fraude fiscale, l'ex-cavaliere a déjà fait savoir, qu'il était prêt à reprendre du service pour mener le centre droit italien à la victoire.

«Je suis de nouveau en lice pour construire avec Forza Italia et le centre droit pour une Italie meilleure», a déclaré mercredi Silvio Berlusconi.

Il n'est pas sûr qu'il y parvienne. Déchu de son mandat de sénateur, il est interdit de toute fonction publique au moins jusqu'en 2016, et inéligible au Parlement au moins jusqu'en 2018. Il a toutefois fait appel de cette interdiction devant la Cour européenne des Droits de l'homme.

«Il reste à vérifier s'il a encore la force physique pour descendre à nouveau dans l'arène. Les années passent et il montre des signes de faiblesse», fait aussi valoir à l'AFP Franco Pavoncello, professeur de sciences politiques à l'Université John Cabot de Rome.

«Berlusconi n'a, pour l'instant, aucune influence au-delà du cercle, désormais assez restreint, de ses partisans», juge Marco Tarchi, professeur de sciences politiques à l'université de Florence, interrogé par l'AFP.

Aux élections européennes en juin 2014, dernier scrutin national en Italie, Forza Italia a obtenu 16,8%, un score très inférieur à ses résultats antérieurs.

Déconcerter ses électeurs 

La Ligue du Nord de Matteo Salvini, 42 ans, anti-euro et anti-immigration a en revanche le vent en poupe, au point de contraindre l'ancien chef incontesté du centre droit à radicaliser son discours et son opposition au chef du gouvernement Matteo Renzi, pour contrer son jeune rival.

Mardi, il a fait voter ses députés contre un projet de réforme constitutionnel, qu'il a pourtant lui-même négocié pendant près d'un an avec le Parti démocrate de Matteo Renzi, au risque de déconcerter ses électeurs.

Une vingtaine de députés de Forza Italia, sur les 65 que compte le parti à la Chambre, ont d'ailleurs manifesté leur opposition à cette ligne politique, dans une atmosphère de «sauve-qui-peut», selon Giovanni Orsina de l'université Luiss de Rome.

«Salvini n'a rien à craindre de la concurrence d'un homme qui est désormais, politiquement, à bout de souffle», assure encore M. Tarchi.

Matteo Renzi peut-il en revanche avoir des raisons de craindre celui qui dispose encore d'un poids au Parlement, particulièrement lorsque viendra le moment de faire adopter ces réformes constitutionnelles?

Le président du Conseil avait eu besoin en janvier des voix de Silvio Berlusconi, avec qui il avait conclu un pacte pour faire adopter au Sénat une nouvelle loi électorale.

Il est possible que sans cet apport de voix, l'autre volet de la réforme constitutionnelle, prévoyant notamment une réduction des pouvoirs de la chambre haute, ne passe pas au Sénat qui doit l'adopter.

Forza Italia a un «problème de cohérence» après avoir soutenu ces changements et décidé de ne plus les voter, selon le rapporteur de ce projet de réforme constitutionnelle à la Chambre, Emmanuele Fiano.

«Mais je ne crois pas qu'ils soient tous d'accord entre eux, et il est donc difficile de savoir ce qui va se passer au Sénat», a-t-il expliqué à l'AFP. Ce deputé, proche de Matteo Renzi, se dit sûr que la réforme sera adoptée, même sans l'appui de Forza Italia.