L'ex-président Nicolas Sarkozy s'évertue à rassembler son parti de droite, l'UMP, mais peine à s'imposer en leader de l'opposition en France, face à l'extrême droite et un pouvoir socialiste sorti renforcé de la période post-attentats.

Même ses amis ne le reconnaissent plus. «Qu'arrive-t-il à Nicolas Sarkozy?», se demandent-ils, où est passé l'homme de la «transgression», celui qui «imposait le débat», au sein de son parti et de son pays?

«Sarkozy est devenu l'homme de la synthèse à l'UMP, alors qu'avant, c'était un guide», déplore sous couvert d'anonymat un élu, pourtant sarkozyste convaincu. «Et il s'est laissé piéger par François Hollande et son "unité nationale" d'après les attentats», se désespère-t-il.

Contraint de se ranger un temps derrière le front républicain suscité par les attaques djihadistes à Paris, Nicolas Sarkozy, 60 ans depuis mercredi, a du mal à faire entendre sa différence face à un duo exécutif dopé par sa gestion unanimement saluée de la crise et une embellie sondagière.

S'il reste plus apprécié que celui qui l'a battu en 2012, François Hollande, (49 % contre 41 % selon un sondage IFOP publié mardi), il se voit écrasé par Manuel Valls (37 % seulement pour Nicolas Sarkozy contre 57 % au premier ministre).

M. Valls, qui empiète sur les plates-bandes traditionnelles de la droite que sont l'autorité et l'ordre, ne serait pas pour rien, d'après des observateurs, dans la difficulté de l'ancien chef de l'État à se positionner et à créer une dynamique.

Nicolas Sarkozy est «coincé; là où on avance notre Valls, il n'a pas d'espace», se réjouit un député socialiste, s'exprimant lui aussi sous couvert d'anonymat.

Primaire payante et ouverte

Les deux hommes se sont affrontés à distance ces derniers jours, notamment autour du terme d'«apartheid» choisi par le premier ministre pour décrire la situation dans certaines banlieues françaises.

Connu pour ne pas mâcher ses mots (il avait parlé de «nettoyer au karcher» une cité difficile en 2005), Nicolas Sarkozy est apparu à contre-emploi en se disant «consterné» par la sortie de M. Valls, et en jugeant que «comparer la République à "l'apartheid" est une faute».

«L'erreur, la faute, c'est de ne pas avoir le courage de désigner cette situation, peu importe les mots», lui a vertement rétorqué Manuel Valls. Une majorité de Français s'est montrée d'accord avec lui, note le même élu sarkozyste.

Pour un ancien ministre UMP demandant aussi à cacher son identité, «Sarkozy peine à se débarrasser de ses habits d'ancien président. Ça l'empêche de faire de la politique».

Soucieux de s'imposer en tant que leader incontestable de son camp et futur candidat à la présidentielle de 2017, Nicolas Sarkozy, à l'occasion d'un retour tonitruant à l'automne sur la scène politique française, a été élu président de l'UMP avec 65 % des voix.

Un score confortable, mais insuffisant pour faire taire les autres ambitions dans son camp. Parmi ses opposants figurent deux anciens premiers ministres, Alain Juppé et François Fillon, son bras droit à Matignon pendant ses cinq années de présidence (2007-2012).

Pour 2017, ces deux anciens responsables sont décidés à affronter leur ancien mentor à qui ils ont imposé d'organiser en 2016 une primaire. Celle-ci, dite «ouverte» et payante (deux euros; 2,80 $), ne sera pas limitée aux seuls membres de l'UMP et tous les Français qui accepteront de signer une charte stipulant qu'ils adhérent «aux valeurs de la droite et du centre» pourront y participer.

Tout n'est pas si noir pour Nicolas Sarkozy. Selon son entourage, il a su réaliser une «synthèse» qui semble avoir mis fin aux querelles internes de l'UMP. «Il n'y a plus de voix discordantes», assure-t-on au sein du parti.

Pour l'heure, l'UMP travaille à faire des élections départementales de mars un succès pour le parti. Le Front national de Marine Le Pen (extrême droite) compte bien aussi confirmer sa percée de 2014 (municipales et européennes).

Selon un sondage de l'institut IFOP pour le magazine Marianne publié jeudi, Marine Le Pen sortirait nettement en tête si le premier tour de l'élection présidentielle de 2017 avait lieu dimanche, avec 29 à 31 %, et aucun de ses rivaux ne dépasserait 23 %, que ce soit Nicolas Sarkozy ou Manuel Valls, tous autour de 23 %, ou François Hollande, à 21 %.