Un État avant la paix, plutôt que l'inverse? Pendant que les négociations en vue d'un accord de paix piétinent toujours entre Israël et l'Autorité palestinienne, le nombre de pays européens qui souhaitent reconnaître la Palestine s'est multiplié au cours des dernières semaines. Explications.

Le Luxembourg est devenu hier le sixième Parlement européen à se prononcer en faveur de la reconnaissance de l'État palestinien. La motion adoptée invite le gouvernement à reconnaître les frontières qui délimitaient la Palestine en 1967, avant la guerre des Six Jours, au moment où il le jugera opportun.

Vendredi dernier, les députés irlandais et portugais avaient eux aussi adopté des motions similaires pour inciter leurs gouvernements à reconnaître la Palestine, comme l'avaient fait avant eux leurs homologues français, britanniques et espagnols.

Ce mouvement en faveur de la reconnaissance de la Palestine est toutefois symbolique, puisque les résolutions adoptées sont non contraignantes, rappelle le professeur Thomas Juneau, de l'Université d'Ottawa, qui croit néanmoins à un impact à long terme.

«Au fur et à mesure que des symboles s'accumulent, ça peut créer un momentum difficile à renverser, affirme le spécialiste du Moyen-Orient. Mais ce qui compte, c'est quand des gouvernements décident de reconnaître l'État palestinien.»

La Suède, qui a officiellement reconnu l'État palestinien le 31 octobre, reste à ce jour le seul pays de l'Union européenne à l'avoir fait. Quelque 135 pays dans le monde reconnaissent la Palestine. Le Canada et les États-Unis ne sont pas du nombre.

Selon Thomas Juneau, la multiplication récente des votes sur la question s'explique par une «irritation et une impatience croissantes en Europe devant l'impasse dans les négociations de paix et l'intransigeance d'Israël».

Vote de l'Union européenne

D'ailleurs, pendant que les députés luxembourgeois enjoignaient à leur gouvernement de reconnaître la Palestine, le Parlement européen adoptait une résolution soutenant le «principe» de la reconnaissance de l'État palestinien.

Le texte, qui précise qu'une reconnaissance doit aller «de pair» avec le processus de paix, n'est toutefois pas contraignant, lui non plus, puisqu'il n'appelle pas les pays membres à reconnaître la Palestine.

«C'est tellement dilué que je ne dirais même pas que ça a une valeur symbolique, s'exclame Thomas Juneau. Évidemment qu'après des négociations [israélo-palestiniennes], la majorité du monde va soutenir un État palestinien!»

Israël en colère

Si Israël a déjà signifié son mécontentement devant ces appels à la reconnaissance de la Palestine, c'est la suppression du Hamas palestinien de la liste européenne des organisations terroristes qui a provoqué la colère de l'État hébreu, hier.

La décision est pourtant technique. La Cour de justice de l'Union européenne a annulé l'inscription du mouvement palestinien sur cette liste (datant de 2001) en raison d'un vice de procédure. Le gel des avoirs du Hamas en Europe est d'ailleurs maintenu et le Conseil de l'UE, qui représente les États membres, peut porter le jugement en appel ou prendre une nouvelle décision.

Le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou a néanmoins déclaré que l'Europe n'avait «rien appris» de l'Holocauste, une réaction «complètement démesurée, absurde et malhonnête», tranche Thomas Juneau.

«De dire que les Européens n'ont rien retenu de l'Holocauste, c'est profondément insultant pour une énorme majorité [d'entre eux], estime-t-il. Des réactions comme ça, ça n'attire pas de sympathie.»

Les pays d'Europe qui reconnaissent la Palestine

Reconnaissance officielle



• Bulgarie

• Chypre

• Hongrie

• Malte

• Pologne

• République tchèque

• Roumanie

• Slovaquie

• Suède

Vote favorable à une reconnaissance



• Espagne

• France

• Irlande

• Royaume-Uni