Human Rights Watch (HRW) et l'Union européenne (UE) ont séparément exprimé leurs inquiétudes jeudi au sujet d'un projet de loi controversé du gouvernement islamo-conservateur renforçant les pouvoirs de la police en Turquie après des émeutes prokurdes sanglantes.

«Le projet de loi proposant l'extension des pouvoirs de la police saperait la protection des droits de l'Homme», a estimé l'organisation internationale de la défense des droits de l'Homme dans un communiqué.

«Le gouvernement a déjà fait passer de nouvelles mesures de police problématiques par le parlement et maintenant il veut se donner encore plus de pouvoirs en matière de sécurité», a déclaré Emma Sinclair-Webb, chercheuse pour la Turquie de HRW.

«Le Parlement doit mettre les freins et s'assurer que ce projet de loi protège les droits de l'Homme ainsi que la sécurité du public», a-t-elle estimé.

Les mesures sont débattues actuellement en commission parlementaire, et devraient être votées en janvier prochain par le parlement où le parti gouvernemental de la justice et du développement (AKP), à l'origine du projet décrié par la société civile, dispose d'une majorité absolue.

Début octobre, alors que leurs frères de Syrie se battaient contre les djihadistes du groupe de l'État islamique (EI) à Kobané, à la frontière turque, les Kurdes de Turquie ont protesté dans les rues contre l'inertie de leur gouvernement, qui refusait alors de laisser passer armes et combattants de l'autre côté de la frontière.

Des affrontements les opposant parfois à des partisans de l'EI ont fait une quarantaine de morts. C'est dans ce contexte que le premier ministre turc Ahmet Davutoglu, a annoncé la prochaine adoption d'une «réforme sur la sécurité intérieure» octroyant des pouvoirs élargis aux policiers.

En visite à Ankara jeudi, le rapporteur pour la Turquie du Parlement européen, Kati Piri, a également exprimé ses préoccupations.

«La violence par la police ne peut être utilisée qu'en dernier recours, nous tenons à préciser que cela doit au moins être souligné dans une législation de ce type», a-t-elle dit devant la presse.

L'opposition accuse le régime d'Ankara de vouloir transformer la Turquie en «État de police» et de faire taire toute contestation la visant comme celle inédite de l'été 2013.