Le Premier ministre britannique David Cameron a lancé mercredi à Edimbourg une supplique aux électeurs écossais, les appelant à ne pas faire voler en éclats le Royaume-Uni, à huit jours d'un référendum sur l'indépendance qui s'annonce extrêmement serré.

Le déplacement sur le terrain de M. Cameron, ainsi que celui de son allié libéral-démocrate au gouvernement Nick Clegg et du dirigeant travailliste Ed Miliband, avait été annoncé en urgence mardi. Soit deux jours après la publication d'un sondage donnant pour la première fois le Oui en tête des intentions de vote, qui a fait l'effet d'une bombe dans le camp du Non.

«J'aurais le coeur brisé si cette famille de nations que nous avons réunies et qui ont réalisé tant de choses remarquables ensemble venait à voler en éclats», a déclaré M. Cameron dans la capitale écossaise, après avoir longtemps tenu secret le détail de son programme dans la crainte de manifestations.

A quelque 75 kilomètres de là, à Glasgow, la capitale économique de l'Ecosse, Ed Miliband s'est également montré lyrique pour défendre l'union. «Ne prenez pas la décision irréversible. Avec votre tête, votre coeur et votre âme, votez pour une Grande-Bretagne unie», a-t-il demandé, tandis que le vice-Premier ministre Nick Clegg promettait «de nouveaux transferts de pouvoir» si les Écossais votaient Non.

«La bande de Westminster panique» 

Les trois hommes ne sont toutefois pas apparus ensemble, les travaillistes ayant refusé d'être présents au côté de M. Cameron, impopulaire dans la région, a souligné le quotidien The Guardian.

Cette triple offensive pour le Non n'a guère impressionné le leader indépendantiste et Premier ministre écossais Alex Salmond, qui a pris un bain de foule dans les rues d'Edimbourg quand M. Cameron discourait dans une salle fermée au public.

«Si la bande de Westminster se jette dans la campagne, c'est parce qu'elle est en train de paniquer», s'est-il gaussé. «Quand nous, nous oeuvrons pour renforcer le pouvoir de notre Parlement afin de créer des emplois en Écosse, eux ne cherchent qu'à protéger leurs postes», a-t-il dit.

«Leur déplacement finira par se retourner contre eux», a renchéri sur le même ton Michael Granados, un militant accompagnant M. Salmond, au milieu d'une nuée de pancartes et de drapeaux appelant à voter «Yes».

«A chaque fois que Westminster intervient dans cette campagne, les votes penchent de plus en plus en faveur du Oui», a-t-il ironisé.

Mercredi soir un nouveau sondage, réalisé pour le quotidien écossais Daily Record par l'institut Survation auprès de 1000 Écossais, accordait six point d'avance au Non. Celui-ci était crédité de 47,6%, le Oui de 42,4% et il restait toujours 10% d'indécis.

Une partie de la presse raillait également ce tir groupé du trio Cameron-Clegg-Miliband, le Sun les présentant dans un montage photo affublés de kilts dans une tentative désespérée de gagner à leur cause les partisans du Oui.

Ce déplacement à Edimbourg constitue une des interventions les plus significatives de M. Cameron dans la campagne et illustre la pression grandissante sur les épaules du dirigeant conservateur, qui joue probablement dans l'affaire son avenir politique.

La reine veut rester impartiale  

M. Cameron avait précédé sa visite en terre écossaise d'une tribune alarmiste dans le quotidien Daily Mail, dans laquelle il appelle les électeurs à peser soigneusement les conséquences d'une victoire du Oui au référendum du 18 septembre.

«Si le Royaume-Uni éclate, il éclate pour toujours. Le choix qui vous est offert est donc clair: un saut dans l'inconnu avec le Oui, ou un avenir meilleur pour l'Écosse avec le Non», a-t-il plaidé.

Acculé, M. Cameron pourrait-il demander à la monarchie d'intervenir, comme l'écrivent les médias britanniques? L'hypothèse a été balayée par Buckingham Palace, bien que les spécialistes de la famille royale évoquent l'inquiétude de la reine Elizabeth II face au possible éclatement du royaume.

«L'impartialité constitutionnelle de la souveraineté est un principe établi de notre démocratie, et la reine l'a démontré tout au long de son règne. Selon ce principe, le monarque est au-dessus de la politique et les responsables au gouvernement ont pour devoir de faire en sorte que cela reste le cas», a souligné un porte-parole du palais royal.