Plutôt discret jusqu'ici dans la campagne référendaire écossaise, le premier ministre britannique David Cameron a fait une rare visite en «territoire hostile», hier, afin de vanter les vertus économiques de l'union. Il en a profité pour promettre plus de pouvoirs pour l'Écosse advenant une victoire du Non.

Dans un discours prononcé à Glasgow devant 230 chefs d'entreprise, Cameron a de nouveau plaidé pour l'intégrité du Royaume-Uni, rappelant qu'une Écosse indépendante serait plus à risque si elle décidait de faire cavalier seul, son succès économique étant largement tributaire de son appartenance au Royaume-Uni. Il a souligné les avantages de la «solidarité et de la stabilité».

L'union, a-t-il affirmé, est «un des marchés uniques les plus anciens et les plus réussis dans le monde. L'Écosse fait deux fois plus de commerce avec le Royaume-Uni qu'avec le reste du monde mis ensemble. Cette économie aide à soutenir un million d'emplois en Écosse».

Cameron a également rappelé que plusieurs industries écossaises - jeu vidéo, technologie sous-marine, biomédecine, entre autres - connaissaient un grand succès international.

Mais ce succès, a-t-il précisé, n'aurait peut-être pas eu lieu sans les «occasions qui viennent avec le fait de faire partie de quelque chose de plus grand, d'un grand marché intérieur, soutenu par une monnaie commune, des taxes communes, des lois et des réglementations communes, sans frontières, sans coûts de transactions, sans restrictions sur la circulation des biens, des investissements et des gens».

Interrogé quelques heures plus tôt par la BBC, Cameron a par ailleurs «garanti» plus de pouvoirs pour l'Écosse si le Non l'emportait, un compromis qui pourrait séduire beaucoup d'Écossais attirés par l'indépendance. «Oui, et bientôt est la réponse à cette question», a lancé Cameron, rappelant que cela donnerait aux Écossais «le meilleur des deux mondes».

Gens d'affaires

La visite du premier ministre britannique survient alors que le bras de fer s'intensifie entre les gens d'affaires qui militent pour un clan ou l'autre, à trois semaines du référendum écossais qui aura lieu le 18 septembre.

Mercredi, plus de 200 chefs d'entreprise pour le Oui ont publié une lettre ouverte dans le quotidien The Herald, en réponse à 130 patrons pour le Non, qui avaient signé une lettre contre l'indépendance, la veille, dans The Scotsman.

Le milieu d'affaires pour le Oui, qui compte essentiellement des entreprises de petite et moyenne envergure, affirme qu'une Écosse indépendante donnerait «plus de pouvoirs et d'avantages à notre force économique dans un monde de plus en plus compétitif».

Le milieu des affaires pour le Non, beaucoup plus puissant, avec des représentants des banques et de l'industrie du pétrole, affirme de son côté que «les arguments économiques pour l'indépendance de l'Écosse ne sont pas convaincants».

Cette joute économique se déroule quelques jours après le débat télévisé entre le premier ministre écossais Alex Salmond et le porte-parole de la campagne du Non, Alistair Darling. Alors que ce dernier avait largement remporté le premier débat il y a trois semaines, il semble que Salmond ait renversé la vapeur lors du second duel. Dans une de ses habiles manoeuvres rhétoriques, le chef du Oui a notamment fait admettre à son rival qu'une Écosse indépendante pourrait conserver la livre, contrairement à ce que les ténors du Non prétendent depuis des mois.

Difficile de savoir si le débat aura un impact sur les intentions de vote. Les sondages, réalisés à la mi-août, donnaient toujours le Non gagnant, à 57% contre 43%.

«L'humeur a changé, observe Neil Hay, qui coordonne la campagne du Oui dans le district d'Édimbourg Sud. Ceux qui étaient indécis ou qui penchaient pour le Non reviennent nous voir avec des questions. Ils sont plus ouverts à l'idée de l'indépendance et n'attendent que deux ou trois confirmations avant de changer de camp. Le débat a certainement joué en notre faveur. Les gens sont moins craintifs au sujet de l'économie et plus intéressés par les implications sociales.»

La visite de David Cameron peut-elle freiner l'élan du Oui? «Ça m'étonnerait, rétorque Neil Hay. Son parti [conservateur] n'est pas très populaire en Écosse. À chacune de ses apparitions, le Oui gagne des points...»