Plusieurs milliers de personnes ont participé samedi à Paris à un rassemblement propalestinien, pourtant interdit, qui a donné lieu à des incidents, une semaine après de violents débordements lors de précédentes manifestations interdites.

Après environ une heure trente de heurts limités entre forces de l'ordre et manifestants, le calme est revenu en fin d'après-midi. Selon le ministère de l'Intérieur, soixante-dix personnes ont été interpellées, dont trente placées en garde à vue, en marge de la manifestation.

Dans le même temps, des milliers de personnes ont défilé dans le calme dans plusieurs villes de France comme chaque week-end depuis le début de l'offensive israélienne à Gaza il y a près de trois semaines.

À Paris, la justice avait confirmé à la mi-journée l'interdiction de la manifestation, décidée par la police au motif que les organisateurs n'avaient pas donné de garanties suffisantes de sécurité.

Le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, avait appelé les organisateurs à renoncer à leur initiative, avertissant qu'ils seraient tenus pour «responsables d'éventuels débordements (...) et passibles de sanctions pénales».

Ignorant les mises en garde, quelque 5.000 personnes s'étaient rassemblées place de la République, point de départ initialement prévu du cortège, sans chercher à défiler en début d'après-midi. Ensuite des manifestants ont lancé des projectiles sur les forces de l'ordre, qui ont riposté avec des gaz lacrymogènes. Un abribus a été détruit et des pierres lancées sur des magasins. Douze policiers ont été légèrement blessés.

Deux heures plus tard la manifestation rassemblait 10 000 personnes selon les organisateurs, 4000 selon le ministère de l'Intérieur.

Au total, environ 2000 policiers et gendarmes avaient été déployés place de la République et dans le quartier de la Bastille où des incidents avaient éclaté près d'une synagogue à l'issue d'une manifestation le 13 juillet.

Selon des sources policières, elles avaient reçu des «consignes de fermeté» pour intervenir en cas notamment de «slogans ou manifestations antisémites».

'Casseurs'

«Israël hors de Palestine, il est fini le temps des colonies», «Israël assassin, Hollande complice», «Nous sommes tous des Palestiniens,» scandaient les manifestants.

De jeunes hommes hissés sur une colonne ont activé des fumigènes aux couleurs de la Palestine et brûlé un drapeau israélien, sous des applaudissements.

Le président François Hollande avait dit le 14 juillet qu'il n'était pas question de laisser «s'importer» en France le conflit israélo-palestinien, au lendemain de débordements près de synagogues, dans le quartier de la Bastille, à l'issue d'une manifestation autorisée.

Le week-end dernier, deux rassemblements interdits avaient dégénéré, l'un à Barbès, dans le nord de Paris, l'autre à Sarcelles, ville de la banlieue nord de la capitale, où des commerces, dont une épicerie casher, avaient été saccagés.

Le premier ministre, Manuel Valls, avait adressé vendredi soir un message d'apaisement aux musulmans de France. Venu à la mosquée d'Evry-Courcouronnes, une des plus grandes du pays, pour la rupture du jeûne du ramadan, il avait assuré qu'il n'y avait pas «deux poids deux mesures» à leur détriment.

Contrairement à d'autres manifestations propalestiniennes en Europe qui ne suscitent pas de polémique, en France l'opposition à l'offensive israélienne s'est doublée d'une controverse sur l'interdiction de certains rassemblements et la montée de l'antisémitisme.

Critiqué par sa gauche et par une partie de l'opposition de droite pour avoir joué le pompier pyromane en interdisant des manifestations, le président Hollande répète qu'il faut «faire respecter l'ordre républicain et refuser les slogans qui expriment la haine».

De leur côté, Amnesty international et Human Rights Watch se sont inquiétées des restrictions à la «liberté de réunion».

En 19 jours, l'offensive israélienne sur Gaza a déjà fait au moins 1000 morts côté palestinien et 39 côté israélien. Une réunion d'acteurs internationaux s'est tenue samedi à Paris, appelant à prolonger le cessez-le-feu humanitaire entré en vigueur en début de matinée.

Au moins 10 000 manifestants propalestiniens à Londres

Quelque 10 000 manifestants selon la police ont défilé samedi à Londres pour demander «la fin du massacre à Gaza».

Portant des drapeaux palestiniens et des pancartes appelant à «la fin du siège» de la bande de Gaza et à la «liberté pour la Palestine», les manifestants se sont rassemblés à la mi-journée devant l'ambassade d'Israël, dans le quartier de Kensington (ouest de Londres).

Ils ont ensuite défilé vers la place du Parlement britannique, et sont passés devant Downing Street, où certains ont crié «Honte à toi, David Cameron !».

«Israël, État terroriste», «Gaza ne pleure pas, nous ne te laisserons pas mourir», «Allah Akbar» (Dieu est grand), scandaient les participants à ce rassemblement, organisé entre autres par la coalition «Stop the War» et le mouvement anticapitaliste «Occupy London».

Une manifestation similaire organisée samedi dernier, qui s'était déroulée sans heurts, avait rassemblé selon les organisateurs quelque 100 000 personnes, tandis que la police avait évalué leur nombre à 15 000.

Plusieurs orateurs, parmi lesquels le chanteur Brian Eno du groupe Roxy Music, ont pris la parole à Parliament Square pour appeler à la fin de l'opération israélienne.

PHOTO JUSTIN TALLIS, AFP

Des manifestants ont envahi les rues du centre-ville de Londres, samedi.