Une manifestation propalestinienne prévue samedi à Paris a été de nouveau interdite par les autorités pour éviter d'éventuels débordements, mais des milliers de personnes pourraient, comme la semaine dernière, braver l'interdit.

Saisi par les organisateurs après l'annonce de l'interdiction par la préfecture de police, le tribunal administratif a rejeté dans la soirée leur recours, mais ils pourraient faire appel devant le Conseil d'État.

Le ministre français de l'Intérieur Bernard Cazeneuve avait auparavant appelé les organisateurs  à «renoncer à la manifestation», initialement prévue à 15H00 (13H00 GMT) place de la République, en plein centre de Paris, au motif qu'elle «présente de sérieux risques de troubles à l'ordre public et des risques d'affrontements».

«Aucun débordement de haine, aucun affrontement ne sauraient être tolérés», a-t-il prévenu.

Les organisateurs, parmi lesquels le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA, extrême-gauche) sont les mêmes que ceux qui avaient appelé à une manifestation le 19 juillet qui, bien qu'interdite, avait rassemblé des milliers de personnes et dégénéré en violences spectaculaires dans le quartier parisien de Barbès. Dix-sept policiers et gendarmes avaient été blessés et 44 personnes interpellées.

Le NPA a appelé vendredi soir «l'ensemble des forces démocratiques, politiques, syndicales et associatives, à s'élever contre cette interdiction» et à participer à la manifestation de solidarité avec les Palestiniens.

Lors de l'audience devant le tribunal administratif, Me Hosni Maati, avocat des organisateurs, a plaidé que «le meilleur moyen d'éviter des troubles à l'ordre public est d'autoriser la manifestation pour que les gens puissent exprimer une émotion légitime» dans un contexte «encadré». Il a souligné qu'une manifestation autorisée avait rassemblé au moins 14.500 personnes mercredi à Paris sans incidents.

Selon des sources policières, les forces de l'ordre ont  reçu des «consignes de fermeté» pour intervenir «très rapidement et interpeller» en cas de non-respect de l'interdiction de manifester ou de «slogans ou manifestations antisémites».

Les lieux de culte, notamment les synagogues, seront protégés «en conséquence» et il y aura plus de 1.200 policiers et gendarmes, les autorités craignant la formation de «petits groupes très mobiles» et pouvant être «disséminés et organisés». En amont, c'est-à-dire dans les gares desservant des trains de banlieue par exemple, il y aura des surveillances et interpellations «si besoin est».

Jeudi, Amnesty international s'était inquiété de «la menace qui pèse en France sur le droit fondamental qu'est la liberté de réunion pacifique». Human Rights Watch a déploré vendredi cette nouvelle interdiction, «entrave disproportionnée à la liberté de réunion et d'expression».

Contrairement à d'autres manifestations propalestiniennes en Europe qui ne suscitent pas de polémique, en France l'opposition à l'offensive israélienne s'est doublée d'une controverse sur l'interdiction par les autorités de certains rassemblements et sur la montée de l'antisémitisme.

Critiqué par sa gauche et par une partie de l'opposition de droite pour avoir joué le pompier pyromane en interdisant des manifestations, le président François Hollande a défendu son credo: «faire respecter l'ordre républicain et refuser les slogans qui expriment la haine».

Les détracteurs du gouvernement soulignent que les manifestations autorisées se sont déroulées sans incident majeur, et que les deux rassemblements qui ont dégénéré le week-end dernier, à Paris et Sarcelles, avaient fait l'objet d'interdictions.