La Grande-Bretagne, suivie de la Belgique, a annoncé jeudi le renforcement de son dispositif de sécurité après l'appel à la vigilance dans les aéroports européens et proche-orientaux desservant les États-Unis, lancé par le gouvernement de Barack Obama inquiet «des nouvelles menaces» terroristes.

Washington n'a pas spécifié la nature exacte, la localisation ou l'imminence du nouveau péril, dans sa mise en garde dévoilée à l'avant-veille de la fête nationale américaine du 4 juillet, mais officiels et experts insistent sur la conjonction inquiétante de deux phénomènes : la mise au point par des réseaux terroristes de bombes de plus en plus sophistiquées et indétectables, et la circulation de djihadistes radicalisés dans des pays en guerre comme la Syrie.

C'est cependant en Afrique, à Kampala, qu'une «menace spécifique» a été mentionnée par l'ambassade des États-Unis en Ouganda. Elle a fait état d'un projet «d'attaque contre l'aéroport international d'Entebbe par un groupe terroriste inconnu le 3 juillet entre 21 h et 23 h (14 h-16 h, heure de Montréal)». L'armée et la police ougandaises ont aussitôt renforcé leur présence.

Interrogé sur les précautions additionnelles au Royaume-Uni, le premier ministre David Cameron s'est montré évasif : «Nous prenons ce genre de décisions en fonction des éléments à notre disposition dans le cadre d'une coopération avec nos partenaires», a-t-il déclaré.

«La sécurité des voyageurs doit primer, nous ne devons prendre aucun risque».

Avant lui, le vice-premier ministre Nick Clegg avait confirmé l'adoption de précautions supplémentaires face «à de nouvelles menaces crédibles».

En Belgique, la ministre de l'Intérieur Joëlle Milquet a été plus spécifique en se référant à une surveillance accrue «du matériel électronique, des tablettes, ordinateurs, téléphones portables pour s'assurer qu'il n'y ait pas de substance explosive».

À Heathrow, premier aéroport international en nombre de passagers, aucun déploiement policier ni aucune file d'attente n'étaient discernables en début d'après-midi. Les responsables aéroportuaires mentionnaient un «business as usual» partout ailleurs dans le pays.

Les autorités britanniques n'ont par ailleurs pas cru bon relever le niveau d'alerte inchangé «à substantiel», soit le 3e rang sur une échelle de 5.

L'alerte américaine

C'est le secrétaire américain à la Sécurité intérieure Jeh Johnson qui a sonné l'alerte en annonçant le déploiement «dans les prochains jours» de nouvelles procédures de sécurité.

Un responsable de son ministère a précisé que les aéroports concernés se trouvaient au Proche-Orient et en Europe.

«Nous ne souhaitons pas divulguer d'éléments sur les niveaux de sécurité à ceux qui nous veulent du mal», a dit à l'AFP un responsable du département américain à la Sécurité intérieure en se contentant d'évoquer des mesures «déjà vues et nouvelles», comme des «contrôles supplémentaires des personnes et de leurs biens».

Le rappel à la prudence intervient dans un contexte de regain de tension au Proche-Orient, en particulier en Syrie et en Irak menacé d'éclatement par l'offensive des djihadistes sunnites de l'État islamique (EI).

Dimanche, le président Barack Obama avait averti que les Européens «aguerris» et embrigadés dans le djihad dans ces deux pays menaçaient la sécurité des États-Unis.

David Cameron a fait un constat identique, estimant que 400 Britanniques ont combattu ou combattent en Syrie aujourd'hui, «et projettent aussi de nous attaquer ici», au Royaume-Uni.

«Nous savons depuis un certain temps qu'il y a des fabricants de bombes sophistiquées au Yémen. La crainte c'est que certains des combattants en Syrie dotés de passeports européens ou américains ne regagnent leur pays avec un savoir-faire dans la fabrication de ces bombes, et posent une menace», résume Margaret Gilmore, chercheuse à l'institut londonien Rusi.

Des experts américains et britanniques ne cachent pas leurs inquiétudes face aux «Artfully Concealed Devices» (ADL), ces explosifs miniaturisés et difficilement détectables, qui seraient mis au point notamment par des artificiers d'Al-Qaida au Yémen.

Plusieurs épisodes - tous déjoués - ont attesté ces dernières années de l'inventivité des terroristes.

Le 22 décembre 2001, le Britannique Richard Reid avait tenté de faire exploser le vol 63 Paris-Miami d'American Airlines en activant une bombe cachée dans ses chaussures piégées.

Trois ans après, les services de renseignements britanniques déjouaient un complot visant à faire exploser en vol sept avions transatlantiques, à l'aide de «bombes liquides» dissimulées dans des boissons énergisantes.

Le 25 décembre 2009, Umar Farouk Abdulmutallab, un Nigerian, a vainement tenté de faire exploser un engin dissimulé dans ses sous-vêtements à l'approche de Detroit.

Enfin 2011, des cartouches d'encre piégées ont été découvertes à l'aéroport britannique des East-Midlands et à Dubai, dans des avions-cargo en provenance du Yémen et à destination des États-Unis.

Jeudi, Ben Friedman, expert américain au Cato institute a évoqué sur la BBC l'inventivité des terroristes et le scénario-cauchemar, celui de bombes indétectables implantées chirurgicalement dans le cops d'aspirants kamikazes. «Nous voulons être prudents et avisés... mais ces types accumulent les échecs», a-t-il cependant relativisé.