Le tueur présumé du Musée juif de Bruxelles, le Français Mehdi Nemmouche, a refusé mercredi d'être remis à la Belgique qui a délivré un mandat d'arrêt européen à son encontre.

«Nous souhaitons qu'il soit jugé en France d'abord parce qu'il est français et qu'il est en France», a déclaré à la presse son avocat, Apolin Pepiezep, devant la cour d'appel de Versailles (banlieue ouest de Paris).

Le mandat d'arrêt européen délivré par la Belgique avait été notifié au suspect peu auparavant, a appris l'AFP de source judiciaire. L'opposition de Nemmouche devrait retarder de quelques semaines sa remise aux autorités belges.

Mehdi Nemmouche a été ensuite conduit à la maison d'arrêt de Bois-d'Arcy, en région parisienne. Resté jusqu'ici mutique sur la tuerie, il était arrivé à la cour de Versailles dans un convoi composé de deux fourgons et d'une voiture banalisée, tandis que des policiers d'élite prenaient position.

Ce Français est soupçonné d'avoir tué le 24 mai trois personnes, un couple d'Israéliens et une retraitée française, et d'avoir laissé une quatrième victime, un jeune employé belge, dans un état désespéré.

Mardi, sa garde à vue a été exceptionnellement prolongée au-delà des 96 heures prévues en matière antiterroriste. Cette mesure ne peut être ordonnée que dans deux cas: un risque imminent d'attentat ou les nécessités de la coopération internationale.

Medhi Nemmouche comptait-il frapper encore ? «Impossible de répondre» à ce stade, avait dit le procureur de Paris François Molins dimanche.

Le ministre français de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, qui devait se rendre mercredi après-midi au Musée juif de Bruxelles, a de son côté jugé «probable qu'il aurait continué à agir».

Le suspect avait été arrêté vendredi à la gare routière de Marseille Saint-Charles, dans le sud de la France, dans un autocar en provenance d'Amsterdam via Bruxelles. Dans ses bagages ont été retrouvés un revolver, une Kalachnikov, une caméra portative de type GoPro et de nombreuses munitions.

Fascination pour Merah

L'enquête se poursuit en France et en Belgique. En France, les enquêteurs sont confrontés au mutisme de cet homme de 29 ans, qui n'a rien dit sur la tuerie ni sur ses motivations.

Selon le portrait qui en a été dressé, Medhi Nemmouche, né à Roubaix, dans le nord de la France, a connu une enfance difficile avant de plonger dans la délinquance, puis dans l'islam radical.

Avant son départ en Syrie, fin 2012, au sortir de cinq ans de détention, il avait été condamné à sept reprises par les tribunaux français, notamment pour braquage.

En Syrie, où il est resté un an, il aurait intégré les rangs de l'État islamique de l'Irak et du Levant (EILL), un groupe islamiste ultra-radical, selon le procureur de Paris.

Les enquêteurs doivent notamment tenter de déterminer quelle suite Nemmouche voulait donner à son périple. Voulait-il retrouver une connaissance dans le Sud? Souhaitait-il fuir en Algérie, d'où est originaire sa famille?

C'est surtout en Belgique toutefois que l'enquête va se développer. Même si les enquêteurs n'ont guère de doute, les expertises balistiques devront dire si les armes retrouvées sur Nemmouche à Marseille sont celles utilisées à Bruxelles.

Les Belges vont également se pencher sur le réseau relationnel de Nemmouche dans ce pays, place forte des candidats au djihad en Syrie. Dimanche, les enquêteurs belges ont mené des perquisitions à Courtrai, à deux pas de la frontière française.

Ce pan de l'enquête doit permettre de déterminer si le profil de «loup solitaire» dressé par le ministre de l'Intérieur est le bon.

Selon une source proche du dossier, en prison, Nemmouche a montré une «certaine fascination pour ce qu'avait fait Merah», qui avait assassiné trois militaires puis trois enfants et un père juifs, en mars 2012, à Toulouse et Montauban (sud-ouest).