La Belgique était de nouveau confrontée lundi au risque d'une énième longue crise politique, au lendemain d'élections législatives marquées par la victoire des nationalistes flamands, mais aussi la résistance des partis traditionnels.

Les Belges vont replonger dès cette semaine dans un fastidieux processus qu'ils connaissent bien : la recherche d'une majorité pour gouverner le pays.

Les protagonistes sont les mêmes que lors de la longue crise de 541 jours qui avait suivi les législatives de 2010, à l'exception du roi Philippe, qui a succédé à son père Albert II en juillet dernier.

Le processus a été lancé lundi en fin de matinée avec le déplacement du premier ministre Elio Di Rupo au palais royal. Il a, comme le veut la tradition, présenté au roi Philippe la démission de son gouvernement, qui a été alors chargé d'exécuter les affaires courantes.

Le roi a lancé les consultations avec les dirigeants des principaux partis et il «les poursuivra jusqu'à demain midi», a indiqué le Palais royal.

Sauf surprise, Philippe devrait appeler le chef de file des nationalistes flamands, Bart De Wever, à chercher des partenaires, y compris francophones, pour constituer un gouvernement fédéral.

Le parti de M. De Wever, la Nouvelle alliance flamande (N-VA), est arrivé en tête du scrutin en remportant quelque 32 % des suffrages en Flandre néerlandophone, où vivent environ 60 % des 11 millions de Belges.

Son succès est «ample, incontestable, impressionnant même», soulignait lundi le quotidien économique L'Écho.

Mais il s'agit aussi d'un «triomphe sans garantie», selon Le Soir, d'un «triomphe inachevé» selon La Libre Belgique, voire d'une «victoire à Pyrrhus» comme l'avertit la presse flamande.

Car la N-VA n'a pas la majorité en Flandre et encore moins en Belgique, où les électeurs n'ont pas puni les six partis de droite, de gauche et du centre qui forment la large coalition au pouvoir depuis fin 2011.

Ces partis, dits «traditionnels», ont en effet conservé leur assise, comme le PS francophone du premier ministre Elio Di Rupo, qui reste le premier parti en Wallonie et à Bruxelles.

«Bogue» informatique

Dans ces conditions, «former un gouvernement fédéral va être très difficile», car «la campagne de la N-VA a mis l'accent sur les oppositions entre le nord et le sud du pays», souligne Bart Sturtewagen, rédacteur en chef du Standaard, l'un des principaux quotidiens flamands.

M. De Wever a d'ailleurs déclaré dimanche soir que «la démocratie flamande n'avait jamais été aussi éloignée de la francophone». Car les francophones «ont voté à gauche et même extrêmement à gauche», a-t-il estimé, en oubliant la percée des libéraux du Mouvement réformateur (MR), en progression sensible en Wallonie.

Respectant les traditions, le PS et le MR n'ont pas fermé la porte à des discussions avec la N-VA pour la formation d'un gouvernement, tout en soulignant leurs profondes divergences avec le programme des nationalistes flamands.

Les observateurs n'excluaient pas que, in fine, la N-VA soit maintenue dans l'opposition si les autres partis réussissaient à s'entendre autour d'une nouvelle grande coalition.

Les résultats définitifs des trois scrutins de dimanche - législatif, régional et européen - n'étaient toujours connus lundi à la mi-journée en raison d'un bogue informatique dans deux régions de Wallonie et dans la capitale. Cet incident a relancé le débat sur le vote automatisé, dénoncé pour avoir été réalisé sur des ordinateurs datant de la fin des années 1990.

En Wallonie et à Bruxelles, les résultats partiels ont montré un fort recul des écologistes, qui ont mis en cause la progression du «vote contestataire» et notamment la percée du Parti des Travailleurs belges (PTB) d'extrême gauche, notamment dans la région industrielle de Liège (sud).