Le premier ministre islamo-conservateur turc Recep Tayyip Erdogan aurait tenu des propos antisémites en s'en prenant violemment mercredi à un contestataire, sur les lieux de la catastrophe minière de Soma, ont rapporté vendredi des médias locaux.

«Où vas-tu espèce de sperme d'Israël, viens par ici!», crie le chef du gouvernement turc dans une vidéo publiée sur le site internet des journaux d'opposition, dont Sözcü, lorsqu'un manifestant le critique apparemment pour sa gestion de la catastrophe qui a tué près de 300 personnes dans une mine de charbon à Soma, ville de l'ouest de la Turquie.

Selon les images, le chef du gouvernement, entouré de nombreux gardes du corps entre dans une supérette de Soma, non loin de la mine, à la porte de laquelle il s'acharne les bras tendus contre une personne non identifiée parmi d'autres habitants, en lui lançant cette diatribe et le tenant par le cou, la scène se déroulant dans une bousculade.

Il n'apparaît pas clairement sur les images si M. Erdogan, hué et pris à partie par des habitants en colère à Soma, gifle ou frappe le manifestant, comme l'affirment ses détracteurs.

Le porte-parole de son parti de la justice et du développement (AKP, islamo-conservateur), Hüseyin Celik, a démenti vendredi devant la presse à Ankara une telle agression physique tout en évitant de répondre en détail aux questions insistantes des journalistes.

«Il n'y a pas d'images sur une gifle», a-t-il affirmé, démentant que le premier ministre ait frappé quelqu'un.

Il n'a en revanche pas été interrogé sur l'insulte antisémite attribuée au premier ministre.

Mais le porte-parole a admis qu'un conseiller de M. Erdogan, pris en photo, avait donné des coups de pied à un manifestant au sol à Soma, mais soutenu la thèse de la «légitime-défense».

L'assistant, Yusuf Yerkel, qui s'est excusé pour son geste jeudi, a été «attaqué et blessé» par cet homme et a obtenu un «arrêt maladie de sept jours pour ses blessures», a affirmé M. Celik.

La photo a indigné et choqué la Turquie endeuillée par la tragédie de Soma, la pire catastrophe industrielle qu'ait connue ce pays, suscitant la colère contre le régime de M. Erdogan, au pouvoir depuis 2002.

Le premier ministre turc, qui a fait ses classes en politique au sein de partis islamistes, mais se définit comme un «démocrate musulman», a à maintes reprises pris verbalement Israël pour cible.

Réagissant à l'opération militaire israélienne «Plomb durci» dans la bande palestinienne de Gaza en 2008, M. Erdogan avait violemment pris à partie le président israélien Shimon Peres lors du forum de Davos, en janvier 2009, avant de quitter le Forum en claquant la porte.

Et en 2013, M. Erdogan avait assimilé le sionisme à un «crime contre l'humanité».

Les relations entre Israël et la Turquie traversent une crise depuis l'assaut israélien, il y a quatre ans, contre une flottille en route pour Gaza qui avait coûté la vie à neuf militants turcs, mais une normalisation semble en vue, Israël s'apprêtant à dédommager les familles des victimes.