Silvio Berlusconi a fait vendredi un passage express d'une demi-journée comme bénévole auprès de malades d'Alzheimer dans un centre spécialisé près de Milan, pour la toute première condamnation judiciaire que l'ex-chef de gouvernement doit purger en 20 ans de vie politique et de procès.

En complet bleu sur un t-shirt sombre, M. Berlusconi est reparti vers 11 h 45 GMT (7 h 45 heure du Québec) de l'Institut Sacra Famiglia à Cesano Boscone, a constaté un journaliste de l'AFP. Quatre heures exactement après son entrée. Il a serré avec chaleur la main du responsable des pavillons de soins de cette institution catholique, Michele Restelli.

Avant de monter en voiture, l'ex-premier ministre (à trois reprises) a adressé de grands sourires à la centaine de journalistes cantonnés à distance, en faisant un geste d'impuissance pour dire qu'il ne pouvait pas parler.

Selon des médias, il risquerait sinon une révocation des mesures de clémence dont il bénéficie pour purger une peine d'un an de prison.

M. Berlusconi a été condamné à quatre ans de détention dont trois amnistiés, le 1er août dernier dans le procès Mediaset pour fraude fiscale, qu'il purge sous forme de travaux d'intérêt général. Sa condamnation lui a aussi valu une interdiction de mandat public qui s'est traduite par son exclusion du Sénat, une interdiction de vote et son inéligibilité.

S'occuper une demi-journée par semaine de personnes déficientes mentalement - difficile à digérer pour cet homme de 77 ans très attaché à son image - fait partie d'un ensemble de contraintes, dont l'interdiction de quitter la région de Milan, assortie toutefois de la permission de se rendre à Rome du mardi matin au jeudi soir.

La première visite de M. Berlusconi au centre pour malades d'Alzheimer a été contestée par un petit groupe de syndicalistes de la structure, dont l'un a pu s'approcher du bâtiment où se trouvait l'ex-Cavaliere.

«Berlusconi ne devrait pas venir ici, il devrait aller à San Vittore (la prison de Milan, ndlr) comme n'importe quel fraudeur ou voleur. Il va faire quoi là-dedans, leur chanter La vie en rose?», a crié Pippo Fiorito, militant de l'organisation radicale CUB, coiffé d'un chapeau de clown avec l'inscription «mayday», avant d'être emmené de force par la police.

Les adversaires de l'ex-Cavaliere sont convaincus qu'il essaiera d'utiliser ses passages à Cesano Boscone à des fins électorales avant les Européennes, auxquelles sa formation Forza Italia, en perte de vitesse, tentera difficilement de se maintenir au-dessus des 20 %.

Stage d'observation

Même si dans des interviews, il s'est défendu de vouloir exploiter la situation à son avantage, il aurait, selon certains médias, amené de petits cadeaux pour les malades et aurait fait une donation à l'Institut Sacra Famiglia.

Il est tellement célèbre que certaines familles auraient demandé à rendre visite à leurs proches spécifiquement ce vendredi et certains infirmiers voudraient être affectés au pavillon de l'Alzheimer.

Pendant sa première demi-journée de TIG, M. Berlusconi s'est apparemment contenté d'observer les malades. Selon les médias, le personnel du centre et les familles se sont vus interdire de faire des photos ou des vidéos de la visite de l'ex-Cavaliere.

La direction du centre a tenu à spécifier que l'ex-chef de gouvernement serait traité comme tout bénévole et que son introduction auprès des malades, toujours accompagné d'opérateurs spécialisés, se ferait «graduellement».

«C'est un endroit caractérisé par le calme, il ne peut pas y avoir d'interventions intempestives, nous l'avons expliqué à M. Berlusconi qui a compris», a expliqué au journal Repubblica le docteur Restelli.

«Nous demandons à tous ceux qui viennent ici d'observer, écouter, ne pas se laisser emporter par l'envie de trop en faire», a-t-il expliqué.

Selon le responsable, il est possible que M. Berlusconi parvienne «à créer des relations privilégiées avec certains». En outre, contrairement à une idée reçue sur l'Alzheimer, «les malades s'en souviennent et souvent attendent l'arrivée de la personne».

Les ennuis judiciaires de M. Berlusconi ne s'arrêtent pas à la fraude fiscale. Il devra affronter en juin le procès en appel pour sa condamnation en première instance à 7 ans de prison pour le «Rubygate», où il est accusé de prostitution de mineure et abus de pouvoir. Un autre procès pour corruption de sénateur a débuté ces derniers mois à Naples.