Jour impair, plaques impaires: la circulation alternée va être mise en place lundi à Paris et dans sa proche banlieue, après cinq jours d'une importante pollution qui devrait reprendre dès dimanche soir et a conduit le gouvernement à employer les grands moyens.

«Le gouvernement se rend compte que cela devient un problème électoral», a ironisé Nathalie Kosciusko-Morizet, candidate UMP à la mairie de Paris, à une semaine du premier tour des municipales.

La veille, elle parlait de «cache-misère», tandis que le Front de gauche et les écologistes d'EELV exprimaient leur satisfaction face à cette mesure, par ailleurs très mal vue des associations d'automobilistes et de motards.

Pour l'Automobile Club Association (ACA), elle est «précipitée, inefficace» et «va surtout générer la pagaille».

Inclure les deux-roues motorisés est «stupide», s'énerve aussi la Fédération française des motards en colère, qui appelle les usagers de motos et autres scooters à «la résistance» et leur propose de partager leur selle, en pratiquant le «comotorage».

La ministre de la Santé Marisol Touraine a balayé les critiques, estimant que «pour la première fois un gouvernement assume ses responsabilités».

À partir de 5 h 30 lundi, sauf dérogations, seuls pourront circuler les véhicules portant une plaque d'immatriculation impaire. La mesure, annoncée samedi par Matignon, est inédite depuis 1997 et pourrait être prolongée mardi.

Quelque 700 policiers seront mobilisés pour surveiller les véhicules en mouvement dans la capitale et 22 communes limitrophes.

Les conducteurs de véhicules en infraction devront s'acquitter d'une amende: 22 euros si elle est réglée immédiatement, 35 euros au-delà de trois jours. Ils seront invités à regagner leur lieu d'origine, faute de quoi leur véhicule sera immobilisé.

Les transports publics resteront gratuits, jusqu'à ce que la circulation alternée soit levée.

Décaler les trajets 

La SNCF et la RATP vont offrir «plus d'un million de places supplémentaires sur certaines lignes de métro, de RER et de Transilien», a annoncé dimanche soir dans un communiqué le ministre des Transports, Frédéric Cuvillier. Il a «recommandé à ceux qui le peuvent de décaler autant que possible leur trajet» en dehors des heures de pointe qui s'annoncent très chargées.

Le stationnement sera lui aussi gratuit à Paris pour les voitures à l'immatriculation paire.

Le ministre de l'Écologie, Philippe Martin a dit s'attendre à «une baisse importante de la fréquentation de voitures». En 1997, l'expérience avait «donné des résultats», a rappelé le ministre, en demandant aux employeurs de «faire preuve de souplesse» en cas de retard de leurs salariés.

«Ça va être le bordel», pestait dimanche Geoffroy, 38 ans, un habitant de la Plaine-Saint-Denis, au nord de la capitale, qui prendra lundi matin, bon gré mal gré, les transports en commun pour se rendre à son travail à Nanterre, à l'ouest.

«Dès hier soir, j'ai prévenu mon patron et décalé mes rendez-vous de lundi», expliquait Nicolas Natchitz, VRP, qui fera du télétravail.

Les dérogations prévues concernent les véhicules électriques ou hybrides, autorisés à circuler quel que soit leur numéro d'immatriculation, de même que les voitures avec au moins trois personnes à bord, les voitures auto-écoles et les taxis.

Les poids lourds seront interdits à l'exception des véhicules d'urgence, camions frigorifiques, engins de chantier, véhicules de nettoiement...

À Paris, Airparif prévoit pour lundi le retour de la pollution, sans toutefois que le seuil d'alerte (80 microgrammes) soit atteint.

Dimanche, les 50 microgrammes déclenchant le seuil d'information étaient dépassés dans une bonne trentaine de départements.

Dans le Rhône, la préfecture a annoncé des mesures légèrement plus restrictives sur la vitesse à partir de lundi et les principaux industriels émetteurs de particules autour de Lyon seront invités à «réduire volontairement leur activité polluante». Si la pollution se maintient à ces niveaux, «des mesures autoritaires» seront prises.

Les particules en suspension dans l'air peuvent provoquer de l'asthme, des allergies, des maladies respiratoires ou cardiovasculaires, et les plus fines d'entre elles ont été classées «cancérogènes certains» par l'Organisation mondiale de la santé (OMS).