La principale chaîne de télévision d'opposition russe, Dojd, a annoncé mercredi avoir été privée du droit de diffuser dans plusieurs villes pour avoir publié un sondage sur le siège de Léningrad jugé «blasphématoire» par des députés.

Le scandale a éclaté après la publication dimanche sur le site de la chaîne, diffusée par câble et sur internet, d'un sondage interrogeant les spectateurs: «Aurait-il fallu livrer Leningrad (aux nazis) pour sauver des centaines de milliers de vies» en évitant ainsi le siège de la ville (aujourd'hui Saint-Pétersbourg) qui a fait plus d'un million de morts?

La question, qui a été rapidement retirée du site, a cependant provoqué une levée de boucliers dans le monde politique et plusieurs médias russes l'ont qualifiée de «blasphématoire».

La compagnie de diffusion des chaînes câblées et satellites Akado qui opère sur Moscou et sa région a indiqué à l'AFP suspendre dès jeudi la diffusion de la chaîne.

«Notre coopération avec Dojd se poursuit depuis 2011, mais ces derniers temps la conception de la chaîne a considérablement changé ce qui nous pousse à nous interroger sur la nécessité de poursuivre sa diffusion sur nos réseaux», a indiqué le président d'Akado Viktor Korech.

Deux autres compagnies de chaînes câblées et satellites, NTV-Plus et Dom.ru (qui diffuse dans 63 villes) ont également annoncé avoir mis fin à leur coopération avec Dojd.

D'autres compagnies comme Rostelekom, Vympelkom et Tricolor, poursuivaient en revanche la diffusion de Dojd en fin de soirée.

Mercredi, les groupes parlementaires de la Douma (chambre basse du Parlement russe) ont condamné à l'unanimité ce sondage, estimant que la question constituait une offense à la mémoire des anciens combattants.

Plusieurs commentateurs libéraux ont dénoncé cette démarche y voyant une attaque politique contre cette chaîne très critique contre le Kremlin.

Le délégué du Kremlin pour les droits de l'homme Vladimir Loukine a condamné l'arrêt de la diffusion de Dojd par certaines compagnies.

«C'est une chaîne qui a beaucoup de succès, brillante et intéressante», a-t-il estimé, cité par l'agence Interfax, tout en critiquant le sondage.

La direction de Dojd, l'un des rares médias en Russie à garder un ton indépendant, a reconnu avoir commis une erreur et s'est excusée pour la question, la qualifiant d'«incorrecte».

En près de 900 jours de siège, de septembre 1941 à janvier 1944, Leningrad encerclée par la Wehrmacht a perdu plus de deux tiers de ses habitants, morts de faim, de froid, d'épuisement ou victimes des bombardements.