Le président ukrainien Viktor Ianoukovitch a accepté lundi l'idée de pourparlers avec l'opposition afin de trouver une sortie à la crise politique que traverse le pays depuis son refus d'un rapprochement avec l'UE.

Au lendemain d'une manifestation réunissant des centaines de milliers de personnes à Kiev et alors que des centaines de personnes restaient dans la rue lundi malgré de fortes chutes de neige, le chef de l'État a annoncé une rencontre dès mardi avec les trois ex-présidents du pays pour évoquer la mobilisation en cours.

Léonid Kravtchouk, le premier président de l'Ukraine indépendante, Léonid Koutchma, dont M. Ianoukovitch a été le premier ministre, et Viktor Iouchtchenko, sorti vainqueur de la Révolution orange de 2004, avaient apporté la semaine dernière leur soutien au mouvement.

Cette rencontre doit poser les bases de pourparlers réunissant pouvoir et opposition dans le but de «trouver un compromis».

Elle coïncidera avec l'arrivée à Kiev de la chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, pour une mission de conciliation avec en vue «la recherche d'une solution politique».

«Il ne s'agit pas d'une médiation formelle», l'UE ne prétend pas régler la crise, une tâche qui revient «aux forces politiques ukraniennes», a souligné la commission européenne.

Le ministre français des affaires étrangères doit recevoir mercredi l'un des leaders de l'opposition, le boxeur Vitali Klitschko.

Les opposants réclament le départ de M. Ianoukovitch, à qui ils reprochent d'avoir renoncé fin novembre à la signature d'un accord d'association avec l'UE au profit d'un rapprochement avec la Russie.

La mobilisation, sans précédent depuis la Révolution orange, a été renforcée par les violences que les forces anti-émeute sont accusées d'avoir commises contre de jeunes manifestants le 30 novembre, puis par une escale vendredi du président ukrainien en Russie, pour des entretiens avec son homologue russe Vladimir Poutine.

L'opposition estime que M. Ianoukovitch prépare en secret l'entrée de l'Ukraine, en grandes difficultés économiques et financières, dans l'Union douanière menée par Moscou avec d'ex-républiques soviétiques.

Dimanche a eu lieu un nouveau rassemblement massif à Kiev d'environ 300 000 manifestants, selon les estimations de l'AFP, et d'autres de dizaines de milliers de personnes dans d'autres villes du pays.

La journée s'est terminée par le déboulonnage très symbolique d'une statue de Lénine, symbole de la domination de Moscou sur l'Ukraine à l'époque soviétique, par quelques dizaines de manifestants, issus notamment du parti ultra-nationaliste Svoboda.

Lundi, des centaines de manifestants continuaient de tenir les barricades dans le quartier voisin abritant les principaux sièges du pouvoir (présidence, parlement, siège du gouvernement...), pratiquement paralysé.

«Nous voulons montrer que nous sommes là, que nous allons tenir», a déclaré Iouri Maïboroda, 53 ans, installé à côté d'une barricade, le bonnet recouvert de neige.

«C'est impossible de faire marche arrière», a confirmé à ses côtés Volodymyr Kiblyk, venu comme lui il y a deux semaines de la ville de Znamenka, dans le centre du pays de 46 millions d'habitants.

Un rassemblement du Parti des régions du président réunissait plusieurs centaines de personnes à proximité, dans un parc jouxtant le parlement.

Le pouvoir a haussé le ton ces derniers jours contre les manifestants, exigeant la fin de l'occupation de certains bâtiments publics et ouvrant une enquête pour une tentative de prise illégale du pouvoir.

Ajoutant à la tension, les autorités ukrainiennes ont évacué lundi les stations du métro desservant la place de l'Indépendance, pour une alerte à la bombe.

Des policiers casqués se sont postés en nombre sur le boulevard Khrechtchatik qui y mène, ce que l'opposition a vu comme une tentative de pression.

«Le pouvoir essaye d'exercer une pression psychologique et de nous effrayer mais les gens se sont rassemblés ici et vont y rester», a dénoncé dans un communiqué Vitali Klitschko.