Les victimes de la thalidomide en Espagne ont finalement obtenu gain de cause après un long combat qui a duré plusieurs décennies.

Un tribunal de Madrid a ordonné hier à la société pharmaceutique Grünenthal de verser des indemnités à 22 victimes du controversé médicament qui avait été autorisé dans les années 60 pour traiter la nausée chez les femmes enceintes. Des milliers de bébés sont nés avec des membres anormalement courts et, dans certains cas, sans bras, jambes ou hanches.

La cour provinciale a ordonné au groupe Grünenthal de verser 20 000 euros (plus de 28 000$CAN) pour chaque point de pourcentage d'incapacité des victimes reconnu par le ministère de la Santé du pays. Le total des indemnisations n'a pas été dévoilé, mais il serait moins élevé que les 268 millions de dollars réclamés au départ par l'Association espagnole des victimes de la thalidomide pour 180 personnes.

La thalidomide a été commercialisée pour la première fois en 1957 en Allemagne. Le produit a fini par être retiré des tablettes au début des années 60. Il a été autorisé notamment au Canada, en Allemagne, en Grande-Bretagne, en Espagne et au Japon. 

Aux États-Unis cependant, le médicament n'a jamais obtenu le feu vert de la Food and Drug Administration. Entre 10 000 et 20 000 bébés dans le monde sont nés avec des malformations en raison de la thalidomide. Il resterait 5000 victimes toujours en vie.

Le fabricant déçu

La société Grünenthal s'est dite déçue du jugement. Elle n'a pas confirmé cependant si elle avait l'intention de faire appel. Pendant le procès, la société a avancé que sa conduite dans les années 50 et 60 était conforme «aux normes en vigueur pour le développement et les tests de l'industrie pharmaceutique à l'époque».

À l'ouverture du procès espagnol, en octobre, plusieurs victimes s'étaient présentées au tribunal avec une pancarte sur laquelle il était écrit: «Justice». L'association estime que la thalidomide a fait jusqu'à 3000 victimes en Espagne, mais plusieurs d'entre elles sont déjà mortes.

Au Canada, des familles ont obtenu des compensations dans les années 70 dans une entente à l'amiable avec la société Richardson&Merrel, qui assurait la distribution du médicament au pays. Selon un rapport de l'Association canadienne des victimes de la thalidomide (ACVT), les victimes ont ainsi obtenu en moyenne l'équivalent de 13 790$ par année.

Dans les années 90, le gouvernement fédéral a aussi accordé des subventions aux victimes de la thalidomide, des sommes qui auraient été insuffisantes, estime l'ACVT.

Grünenthal avait présenté ses premières excuses aux victimes du monde entier en septembre 2012, soit 50 ans après les premiers cas de malformations, affirmant être «vraiment désolée» pour son long silence.

- Avec l'AP et l'AFP