Le Parlement croate vote vendredi sur l'organisation d'un référendum par lequel des groupes soutenus par l'Église catholique souhaitent faire amender la Constitution afin d'interdire le mariage homosexuel, alors que les opposants dénoncent une démarche discriminatoire.

Le vote au Parlement intervient à la demande d'un collectif conservateur baptisé «Au nom de la famille» qui a rassemblé sur une pétition quelque 700 000 signatures auprès des citoyens favorables à ce que le mariage soit défini par la Constitution comme «une union entre un homme et une femme».

Pays balkanique de 4,2 millions d'habitants, dont près de 90 % sont de confession catholique, la Croatie a adhéré en juillet à l'Union européenne.

L'actuelle Constitution ne dispose d'aucune définition du mariage.

Si une majorité d'élus vote en faveur de l'organisation du référendum, le scrutin devrait avoir lieu le 1er décembre.

Les défenseurs des droits de l'Homme et des militants LGBT (lesbiennes, gais, bisexuels et transsexuels) affirment qu'un tel référendum sera «discriminatoire». Ils ont appelé la Cour constitutionnelle à donner son avis sur sa légalité.

«Il s'agit indubitablement d'une question touchant aux droits de l'Homme. Un tel sujet ne peut pas faire l'objet d'un référendum», assure Sanja Juras, figure de proue des militants pro-homosexuels.

Le mariage homosexuel n'est pas autorisé en Croatie, mais les mouvements conservateurs affirment qu'ils souhaitent bloquer une telle éventualité, après l'annonce par le gouvernement d'une nouvelle législation en la matière visant à autoriser le partenariat enregistré.

En 2003, la Croatie a accordé aux couples du même sexe les mêmes droits qu'aux hétérosexuels vivant en union libre, dont une sorte de reconnaissance de la communauté de biens.

Si approuvé par les élus, ce référendum sera le premier à être organisé à l'initiative des citoyens dans cette ancienne république yougoslave indépendante depuis 1991.

Selon la loi croate, la réussite d'un référendum ne dépend pas du taux de participation et le résultat sera validé, quel que soit le nombre de citoyens qui s'exprimeront.

Les droits des homosexuels sont toujours un thème très sensible dans ce pays où l'Église catholique détient un rôle particulièrement influent.

La première Gay Pride a été organisée à Zagreb en 2002. Elle a été suivie d'incidents dans lesquels des dizaines de participants ont été tabassés par des extrémistes.

Depuis, ces défilés sont organisés chaque année sans incident, mais toujours en présence d'un important dispositif policier.

Neven Rauk, un cuisinier de 28 ans au chômage, a confié à l'AFP que les «homosexuels ont toujours peur de sortir du placard» en Croatie.

«Nous faisons changer les lois, mais l'état d'esprit de notre société change plutôt lentement», déplore ce jeune homme qui affirme avoir fait l'objet d'agressions homophobes.

«Le référendum, s'il a lieu, sera une violation de mon droit d'être différent, de mon droit à l'équité qui est garanti par la Constitution», a-t-il ajouté.

Des représentants du collectif «Au nom de la famille» rejettent les accusations d'«homophobie» contre leur camp et dénoncent à leur tour les actions de «groupes agressifs» des droits des homosexuels.

«Faire en sorte qu'une relation homosexuelle soit égale à un mariage n'est pas une question des droits de l'Homme», disent-ils.

Environ 54 % des Croates soutiennent l'organisation d'un tel référendum, contre 30 % qui s'y opposent, selon un récent sondage.

«Nous sommes un pays conservateur et la voix de la majorité doit être entendue», insiste Marija Jankovic, une catholique pratiquante de 40 ans.