La police a évacué tôt jeudi l'ancienne télévision nationale grecque ERT, occupée depuis juin par des journalistes licenciés après la décision brutale du gouvernement de fermer cette institution, jugée trop coûteuse dans une Grèce en crise.

Aux premières heures de la matinée, la police anti-émeute, en présence d'un procureur, est entrée dans les locaux de l'ancienne radio-télévision, situés dans une banlieue nord d'Athènes, a constaté un journaliste de l'AFP.

D'autres policiers ont repoussé hors des locaux environ 200 personnes qui protestaient contre l'évacuation.

Syndicats et partis d'opposition de gauche ont fortement dénoncé l'intervention policière et ont appelé dans la foulée à une manifestation devant les locaux de l'ERT à 14h GMT.

Les anciens employés de l'ERT ont appelé «tout citoyen à être présent pour défendre la démocratie».

Selon les témoignages, des policiers ont forcé les portes de l'établissement et d'autres ont sauté par dessus des grilles pour pénétrer dans les locaux. Mais aucun affrontement n'avait été constaté vers 7h, alors que l'opération des forces de police se terminait.

Quatre employés de l'ERT ont été arrêtés dont le dirigeant du syndicat de l'ERT (Pospert) le journaliste Panagiotis Kalfagiannis. Ils ont été remis en liberté dans les heures qui ont suivi, selon l'Agence de presse grecque (Ana, semi-officielle).

«D'après ce que j'ai vu sur les caméras de surveillance, la police a forcé les serrures de l'entrée principale à 4h20, a déclaré Nikos Kounoupis, un agent de sécurité.

«Ensuite, ils ont commencé à courir à l'intérieur», a-t-il dit, ajoutant qu'il ignorait le nombre d'ex-employés qui se trouvaient sur place au moment de l'irruption de la police.

Une intervention pour «appliquer la loi»

«L'intervention de la police a été effectuée pour appliquer la loi (...), l'occupation du bâtiment était illégale», a indiqué pour sa part le porte-parole du gouvernement Simos Kédikoglou dans un bref communiqué, publié quelques heures après l'assaut de la police au siège de l'ERT.

«Le bâtiment aurait dû être rendu au gouvernement plus tôt», a déclaré à la radio Vima  Pantélis Kapsis, ministre de la «Télévision publique» (DT), l'organe transitoire de radiodiffusion mis en place par le gouvernement en juillet en attendant le lancement de la nouvelle radiotélévision publique (Nerit).

M. Kapsis a annoncé le déménagement «dans deux semaines» de la DT au siège de l'ERT. La DT diffuse depuis juillet des émissions depuis un petit studio sous-équipé, situé à quelques kilomètres du siège de l'ancienne télévision publique.

La Grèce doit assumer le 1er janvier la présidence semestrielle tournante de l'Union européenne et s'inquiétait d'offrir l'image d'un audiovisuel défaillant, selon les observateurs.

Mais la Nerit ne doit pas commencer ses émissions avant 2014, a déclaré en octobre à l'AFP, le président du Conseil de tutelle de la nouvelle entité et doyen de la faculté de droit de l'université d'Athènes, Theodore Fortsakis.

La mise en place de la Nerit a été confiée à des personnalités réputées indépendantes, avec la volonté d'échapper aux accusations de clientélisme et de gabegie qui plombaient l'ERT.

Depuis la fermeture brutale de l'audiovisuel public le 11 juin et le licenciement de 2.600 personnes, un nombre variable d'employés licenciés de l'ERT occupaient le bâtiment.

Cette décision avait provoqué une émotion considérable, tant en Grèce qu'à l'étranger.

Elle avait failli provoquer la chute du gouvernement de coalition d'Antonis Samaras, avec le départ d'un des ses alliés de la coalition.

Refusant leur licenciement, des anciens employés poursuivaient depuis juin des émissions sauvages à partir des locaux occupés.

Arguant du fait que la télévision coûtait 300 millions d'euros par an, dans un pays en proie à une très grave crise économique, M. Samaras a depuis refusé le rétablissement de la radio-TV nationale sous sa forme initiale.

La Grèce est sous la pression de la troïka des créanciers (UE-BCE-FMI), qui réclament de nouvelles mesures d'austérité, même si de sévères coupes ont déjà été opérées chez les fonctionnaires, sur les salaires et sur les retraites.

Des représentants de la troïka sont à Athènes depuis lundi pour effectuer l'audit régulier des comptes grecs en vue du déblocage d'une nouvelle tranche d'un milliard d'euros de prêts au pays.