Le Parti social-démocrate (CSSD) tchèque a remporté samedi les législatives anticipées mais les populistes du mouvement ANO ont créé la surprise, arrivant deuxième devant les communistes, rendant particulièrement difficile la composition d'une coalition gouvernementale.

Le CSSD a obtenu 20,47 % des voix, selon des résultats quasi-définitifs devant le mouvement ANO, fondé en 2011 par l'influent homme d'affaires d'origine slovaque Andrej Babis, devenu deuxième force politique du pays avec 18,66 %. Les communistes du KSCM se retrouvent à la troisième place avec 14,91 %.

Quatre autres partis ont également franchi le seuil d'éligibilité de 5 % des voix : les partis de droite TOP 09 (11,98 %) et ODS (7,72 %), les chrétiens-démocrates KDU-CSL (6,78 %) et une autre formation populiste Usvit (L'aube de la démocratie directe) de l'homme d'affaires tchéco-japonais Tomio Okamura, avec 6,89 %.

«Le résultat n'est pas tel que nous l'attendions», a avoué le chef du CSSD Bohuslav Sobotka. Il tablait sur un résultat autour de 30 % ce qui lui aurait permis de former un gouvernement minoritaire soutenu tacitement par les communistes.

«Les tractations seront difficiles, un gouvernement minoritaire ainsi qu'un gouvernement de coalition figurent parmi les alternatives», a-t-il ajouté.

Le CSSD et le KSCM n'ont réuni ensemble que 83 sièges au sein de la Chambre basse de 200 élus, nettement sous la majorité espérée.

De plus, selon M. Babis, ANO ne s'apprêtait pas à entrer au gouvernement. «Nous ne voulons pas entrer au gouvernement, nous voulons surtout imposer des lois importantes au Parlement», a-t-il dit avant d'exclure formellement toute coopération avec le KSCM et les partis de droite ODS et TOP 09.

«Je n'arrive pas à imaginer aujourd'hui une coopération avec le CSSD, vu son programme. Nous avons besoin de la stabilité, des impôts peu élevés, de la confiance des investisseurs étrangers», a-t-il ajouté.

«Nous ne soutiendrons sûrement pas un gouvernement de gauche», a encore martelé M. Babis, ex-membre du parti communiste avant la «Révolution de velours» de 1989 et aujourd'hui deuxième fortune du pays, propriétaire du groupe Agrofert (agroalimentaire, chimie) et de l'influent groupe médiatique MAFRA.

ANO («Oui» en tchèque et acronyme pour Action des citoyens insatisfaits) est un mouvement anti-politique, scandant des slogans du genre «nous ne sommes pas comme les hommes politiques» et «nous travaillons dur».

«Comme le CSSD ne peut pas créer une coalition avec le KSCM, il sera obligé de se mettre d'accord avec ANO», a résumé l'analyste Josef Mlejnek, interrogé par l'AFP.

Les programmes du CSSD et d'ANO prônent tout deux  l'instauration d'une pension de retraite minimum et la déclaration du patrimoine, mais divergent sur la hausse des impôts à laquelle ANO est opposée.

Une éventuelle coalition CSSD - ANO représenterait 98 sièges sur les 200 de la Chambre basse. Associés aux chrétiens-démocrates du KDU-CSL, les deux  pourraient théoriquement créer une forte coalition à trois avec 112 sièges.

«La variante la plus probable à mon avis, c'est la coalition CSSD-KDU-CSL, avec un soutien d'ANO», a déclaré à l'AFP l'analyste Jan Outly.

Selon M. Mlejnek, le gouvernement intérimaire de l'économiste de gauche Jiri Rusnok, installé après la chute en juin du gouvernement centre droit de Petr Necas, pourra rester en place jusqu'à la fin de l'année, les négociations risquant d'être longues.

Selon lui, la position du président Zeman est désormais «affaiblie», en raison de l'échec du parti de ses supporters SPOZ, resté sous la barre des 5 %.

Le taux de participation a atteint environ 59,47 %, en baisse comparé à 62,6 % lors des dernières législatives en 2010.

Face à cette situation compliquée du fait de la répartition des forces politiques, certains n'excluent pas de nouvelles élections. «Le résultat des élections est tragique, un nouveau scrutin pourrait avoir lieu au printemps», a déclaré Ondrej Liska, chef du parti des Verts, resté devant la porte de la Chambre basse.

Le pays, qui compte 10,5 millions d'habitants, vient de sortir d'une période de récession économique de 18 mois et le taux de chômage atteignait 7,6 % de la population active en septembre.