Un tribunal néerlandais a décidé de ne pas imposer de peine de prison à un homme reconnu coupable d'avoir aidé sa mère âgée de 99 ans à se suicider en 2008, a annoncé le tribunal de Zutphen (est), appelant au débat public.

Albert Heringa, 77 ans, «a délibérément choisi de ne pas respecter les règles», a indiqué le tribunal dans un communiqué. «Mais vu que le tribunal est convaincu qu'il a agi par amour pour sa mère, il ne sera pas puni».

Le parquet avait requis une peine de trois mois de prison avec sursis contre Albert Heringa, qui encourait jusqu'à trois ans de prison, selon les médias néerlandais.

L'histoire de M. Heringa et de sa mère avait fait l'objet d'un documentaire diffusé en février 2010.

Le documentaire montre notamment le moment où Mme Heringa fait ses adieux à sa petite-fille. «J'ai hâte», dit-elle notamment. On y voit également le moment où elle ingurgite les pilules apportées par son fils.

En 2008, M. Heringa avait aidé sa mère, Moek Heringa, à mettre fin à ses jours en se procurant des pilules après qu'un médecin eût refusé à sa mère de pratiquer l'euthanasie, légale aux Pays-Bas depuis 2002.

«Tout d'abord, le 'non' du médecin n'était pas définitif», a souligné le tribunal : «ensuite, si ce médecin avait dit non, Heringa aurait dû solliciter un autre médecin».

Les Pays-Bas ont été avec la Belgique le premier pays au monde à légaliser l'euthanasie, en 2002.

Le médecin est au centre de ce processus. Pour que l'euthanasie ait lieu, il doit avoir la conviction qu'il n'existe pas d'autre solution raisonnable pour le patient et que la souffrance doit être «insupportable et sans perspective d'amélioration».

Ces dispositions, qui peuvent être sujettes à interprétation, font régulièrement l'objet d'un débat aux Pays-Bas.

L'aide au suicide telle que celle fournie à Mme Heringa est illégale et son fils, par l'intermédiaire du documentaire et de sa présence occasionnelle sur des plateaux de télévision, souhaitait contribuer au débat public.

De plus en plus de voix s'élèvent aux Pays-Bas pour revendiquer le droit à l'aide à «partir de manière digne», une fois sa vie «accomplie», et pas seulement lorsque les critères de la loi sur l'euthanasie sont remplis.

«Le tribunal rend son jugement pleinement conscient d'être dans une époque qui voit croître les possibilités de la médecine et l'espérance de vie, une époque dans laquelle les gens se soucient de l'autodétermination, leur capacité à garder leur propre identité et qualité de vie», souligne le communiqué.

«Le débat public doit très certainement avoir lieu», a poursuivi le tribunal, avant d'ajouter : «c'est au monde politique de décider si oui ou non il faut faire quelque chose».