Le gouvernement grec a exclu lundi des élections anticipées après le démantèlement d'Aube dorée dont d'ex-militants ainsi qu'un rapport judiciaire mettent au jour de nombreuses «actions criminelles» du parti néonazi grec, surtout des opérations coordonnées contre des migrants.

Après le placement en garde à vue samedi du fondateur et député d'Aube dorée Nikos Michaloliakos, de cinq autres députés et d'une quinzaine de militants, accusés de participation à une «organisation criminelle», la presse grecque a évoqué l'éventualité d'élections anticipées en cas de démission des 18 députés de ce parti.

Les scénarios sur des élections anticipées sont inexistants, ce serait dangereux pour l'économie et la stabilité politique et sociale du pays», a dit M. Vénizélos, vice-président du gouvernement et ministre des Affaires étrangères.

«Personne ne peut provoquer une crise parlementaire», a ajouté M. Vénizélos en soulignant qu'il ne croyait pas que les députés d'Aube dorée «allaient oser démissionner».

Le parti néonazi, dont son chef et ses principaux lieutenants ont été arrêtés le week-end dernier, avait constitué des «milices d'assaut», souligne le rapport judiciaire du vice-procureur de la Cour suprême, Charalambos Vourliotis, consulté par l'AFP.

Ces dernières années, ces milices s'en prenaient en particulier «aux migrants pakistanais», ont révélé les témoignages devant la justice de deux ex-membres du parti, cités par le rapport judiciaire.

«J'ai participé à plusieurs reprises à des actions où prenaient part 50 à 60 motos, avec deux personnes sur chacune. Celui qui était à l'arrière tenait un bâton avec le drapeau grec et frappait tous les Pakistanais qu'il rencontrait», a révélé un de ces ex-militants.

En janvier, un Pakistanais a été tué à coups de couteau par deux néonazis présumés près du centre d'Athènes.

Selon le rapport judiciaire, l'Aube dorée dispose d'une «structure strictement hiérarchisée, le dirigeant étant tout puissant selon le système mis en place par Hitler, le Führerprinzip».

Évoquant l'idéologie raciste de cette formation, le vice-procureur souligne que «pour les membres du parti, ceux qui n'appartiennent à la "tribu" sont des sous-hommes. Dans cette catégorie figurent les migrants, les Roms, ainsi que les handicapés».

Toujours selon ce texte, le parti «dont les membres bénéficient d'un entraînement de type militaire a commis des dizaines d'actions criminelles», dont «deux homicides volontaires, trois tentatives d'homicide, et de nombreuses attaques contre des immigrés».

«Le phénomène le plus inquiétant est le recrutement de mineurs pour former des organisations de jeunes militants».

«La goutte d'eau qui a fait déborder le vase a été quand ils ont tiré avec des armes contre deux Pakistanais. L'un a réussi à s'enfuir, mais l'autre a été rattrapé, violemment battu à coups de pieds dans la tête. Les agresseurs disaient: "On frappe un penalty" ou "Peut-être qu'il est mort"», a déclaré un des ex-militants.

La police a poursuivi lundi ses perquisitions dans des locaux d'Aube dorée et recherchait des caches d'armes, après les arrestations ce week-end de son dirigeant et fondateur, Nikos Michaloliakos, de six députés du parti, et d'une quinzaine de ses membres.

Cette vague d'arrestations est intervenue dix jours après le meurtre d'un militant antifasciste par un néonazi membre d'Aube dorée dans la banlieue sud-ouest d'Athènes. L'assassinat du musicien antifasciste Pavlos Fyssas, a bouleversé l'opinion publique et a contraint le gouvernement à agir contre Aube dorée, qui jusque-là bénéficiait d'une quasi-impunité.

Surfant sur la grave crise économique et sociale en Grèce, ce parti est entré au Parlement pour la première fois lors des élections de juin 2012, après avoir agi en groupuscule clandestin pendant plus de deux décennies.

À la suite d'un rapport du ministre de l'Ordre public, Nikos Dendias, selon lequel l'action d'Aube dorée «mine l'État de droit et porte atteinte aux droits de l'homme, à la sécurité nationale et à la tradition démocratique», une vaste enquête judiciaire est en cours depuis la semaine dernière.

«Le gouvernement a la volonté de surmonter non seulement la crise, mais aussi la crise des valeurs en Grèce», a affirmé M. Vénizélos tout en déplorant «le retard pris» par les autorités d'agir contre cette formation.