Nadejda Tolokonnikova, une des deux Pussy Riot emprisonnées, a été hospitalisée dimanche au septième jour d'une grève de la faim engagée contre les menaces de mort dont elle affirme être la cible après avoir dénoncé des conditions de vie et de travail dans son camp proches de l'esclavage.

«Les médecins l'ont prise en charge aujourd'hui», a déclaré à l'AFP Sergueï Chaline, haut responsable à l'hôpital N° 21, situé dans le village de Barachevo, en Mordovie (600 km à l'est de Moscou), où la jeune femme a été transférée.

Il n'a cependant donné aucune précision sur son état de santé.

Le service d'application des peines de la région a confirmé peu après dans un communiqué que Mme Tolokonnikova avait bien été transférée à l'hôpital.

L'établissement hospitalier en question est affilié à l'administration pénitentiaire et prend en charge les détenus, mais il est situé en dehors du camp de travail pour femmes N° 14 de Mordovie, où Nadejda purge une peine de deux ans pour une «prière punk» contre le président russe Vladimir Poutine, chantée dans la cathédrale du Christ Sauveur à Moscou.

Interrogé par l'AFP, le mari de la jeune femme, Piotr Verzilov, a indiqué se trouver «actuellement devant l'hôpital» dans l'espoir de pouvoir rencontrer la direction, puis sa femme.

Il a en effet affirmé ne pas avoir pu entrer en contact avec elle depuis plusieurs jours.

La défense de la jeune femme a dénoncé ces faits dans une lettre ouverte publiée dimanche et adressée au directeur du service russe d'application des peines.

«Étant donné que l'administration de la colonie pénitentiaire N° 14 bloque l'accès à la détenue Tolokonnikova (...), nous n'avons pas eu de nouvelles venant directement d'elle depuis plus de 60 heures», est-il écrit dans cette lettre.

Il y est également rappelé que le médecin et le directeur du camp avaient décrit vendredi l'état de santé de Nadejda comme «très mauvais».

Ce jour-là, la jeune femme de 23 ans avait été transférée à l'infirmerie sur «recommandation des médecins».

«Honnêtement, je suis paniquée», a ajouté l'avocate de Nadejda, Irina Khrounova, dans une interview publiée samedi par le journal d'opposition Novaïa Gazeta.

«La dernière fois que nous avons entendu Nadia (diminutif de Nadejda), c'était jeudi soir. Elle nous a dit qu'elle avait des problèmes de santé», a précisé l'avocate.

Ancienne étudiante en philosophie et mère d'une fillette de 5 ans, Nadejda Tolokonnikova a annoncé lundi commencer une grève de la faim, se disant menacée de mort après avoir dénoncé les conditions de détention dans son camp de travail.

Dans une lettre transmise à la presse, elle a fait un récit des conditions au camp de travail, pouvant rappeler des témoignages sur le Goulag soviétique.

Selon elle, les prisonnières sont systématiquement humiliées et réduites à l'état d'«esclavage», forcées de travailler 16 ou 17 heures par jour et privées de sommeil, et doivent vivre dans des conditions d'hygiène élémentaires.

Toute incartade, tout relâchement sont punis de sanctions et d'humiliations.

Cela peut être l'interdiction de rentrer au baraquement, été comme hiver : selon elle, une des détenues a ainsi eu une jambe et les doigts d'une main gelés et amputés. Une autre sanction peut être l'interdiction de se laver et d'aller aux toilettes, a ajouté Nadejda Tolokonnikova.

Dans une plainte séparée adressée à la justice, elle a accusé le directeur adjoint du camp, Iouri Kouprionov, de l'avoir menacée de mort le 30 août dernier après qu'elle se fut plainte des conditions de détention et de travail.

La jeune femme réclame depuis une enquête à l'encontre du responsable et exige que le Code du travail soit respecté dans le camp.

Elle souhaite également qu'on la transfère dans une autre colonie pénitentiaire.

De son côté, le Service russe d'application des peines a rejeté toutes les accusations de Nadejda Tolokonnikova.

Cette dernière a été condamnée en août 2012, avec deux camarades, à deux ans de détention. L'une des trois a été libérée, mais Nadejda Tolokonnikova et Maria Alekhina, qui ne veulent pas se reconnaître coupables, se sont vu refuser toute libération anticipée. Leur détention doit s'achever en mars 2014.