Un tribunal russe a ordonné dimanche le placement en détention pour deux mois de sept autres membres de l'équipage du navire de Greenpeace, l'Arctic Sunrise, visé par une enquête pour «piraterie» après une opération contre une plateforme de Gazprom en Arctique.

L'ensemble de l'équipage, composé de 30 membres dont 26 étrangers et quatre Russes est ainsi placé en détention préventive jusqu'au 24 novembre à Mourmansk et dans sa région, le temps de conclure l'enquête.

Un tribunal de cette ville du nord-ouest de la Russie avait en effet déjà pris une décision similaire concernant 22 membres d'équipage après l'ouverture de l'enquête pour piraterie, un crime passible de 15 ans de prison en Russie.

Celle-ci avait été lancée après que les militants de Greenpeace ont tenté la semaine dernière d'aborder une plateforme du géant russe Gazprom dans l'Arctique afin de dénoncer les projets d'exploitation pétrolière dans cette zone.

Réagissant dimanche dans un communiqué à ces décisions, Kumi Naidoo, directeur général de Greenpeace International, a estimé qu'il s'agissait d'une «tentative flagrante d'intimider quiconque s'oppose à la ruée vers le pétrole de l'Arctique».

Huit autres membres d'équipage avaient initialement été placés en détention préventive pour 72 heures et leurs audiences repoussées à dimanche car la juridiction ne disposait pas d'informations suffisantes ou n'avait pas trouvé d'interprètes.

Parmi les 30 membres de l'équipage du brise-glace de Greenpeace, battant pavillon néerlandais, figurent en effet des ressortissants de 18 pays, dont six Britanniques, deux Canadiens et un Français.

Mais dimanche, le tribunal de Mourmansk a décidé de maintenir, aussi, en détention Dmitri Litvinov, un Suédo-Américain d'origine russe, porte-parole de Greenpeace et arrière-petit-fils d'un ministre des Affaires étrangères de Staline, un Ukrainien, deux Néerlandais, deux Britanniques, la Finlandaise Sini Saarela et la Brésilienne Ana Paula Alminhana Maciel.

«Je suis une personne honnête et je réponds toujours de mes actes. Je ne suis pas un pirate», a lancé lors de l'audience Sini Saarela, militante chargée d'escalader la plate-forme de Gazprom dans la mer de Barents, selon un communiqué de Greenpeace.

Des diplomates de plusieurs pays assistaient également aux audiences.

L'Arctic Sunrise avait été arraisonné le 19 septembre par un commando héliporté des garde-côtes russes, puis remorqué jusqu'à Mourmansk.

Les militants ont nié avoir commis des actes de piraterie, accusant la Russie d'avoir pris illégalement d'assaut leur bateau dans les eaux internationales.

Le président russe Vladimir Poutine a de son côté reconnu que les militants «n'étaient pas des pirates» mais qu'ils avaient «enfreint le droit international».

Le comité d'enquête russe, principal organe chargé des investigations criminelles, a indiqué que les accusations pourraient être réduites pendant l'enquête.

Parmi les personnes emprisonnées figure le capitaine de l'Arctic Sunrise, l'Américain Peter Willcox. Celui-ci commandait le Rainbow Warrior, coulé en 1985 dans le port d'Auckland (Nouvelle-Zélande) par les services secrets français, alors qu'il faisait campagne contre les essais nucléaires menés en Polynésie.

Un photographe pigiste, Denis Siniakov, travaillant sous contrat avec Greenpeace, a aussi reçu cette sanction.

L'arrestation de ce photographe ayant travaillé dans le passé pour l'AFP et Reuters a provoqué un tollé dans les milieux journalistiques russes. Les médias de tous bords ont exprimé leur solidarité avec M. Siniakov.

Dimanche, des journalistes russes récoltaient des signatures à Moscou pour une pétition réclamant sa libération.

De leur côté, les Pays-Bas, invoquant le droit maritime, ont demandé aux autorités russes de libérer l'équipage.

Quatorze membres sont actuellement incarcérés dans un centre de détention à Mourmansk, et huit dans une ville avoisinante.

Selon Irina Païkatcheva, qui dirige une commission d'observation sur le respect des droits des prisonniers dans la région de Mourmansk, un Britannique est actuellement détenu avec deux ressortissants russes, soupçonnés de vol, ce qui est contraire à la loi.

«C'est une violation», a-t-elle dit à l'AFP, expliquant que, selon la législation russe, les suspects étrangers doivent être détenus séparément des Russes.

Elle a par ailleurs ajouté que les membres de l'équipage étaient détenus dans «des conditions satisfaisantes».

«La nourriture est décente. Les cellules sont assez grandes», a-t-elle dit.

Les centres de détention provisoire et les colonies pénitentiaires de Russie sont régulièrement au centre de scandales de mauvais traitements de prisonniers.