Un tribunal turc a accepté mardi de juger huit suspects dont quatre policiers accusés par le ministère public d'avoir assassiné un manifestant pendant le mouvement de contestation antigouvernementale de juin et qui risquent la prison à vie.

La deuxième chambre criminelle d'Eskisehir (ouest) a jugé recevable l'acte d'accusation que lui avait transmis le 9 septembre le procureur de la République Hakan Ali Erkan, ouvrant la voie à l'organisation d'un procès, a rapporté l'agence de presse Dogan.

Le ministère public a réclamé dans ce document la réclusion à perpétuité pour les huit suspects du «meurtre avec préméditation» d'Ali Ismaïl Korkmaz, un homme de 19 ans passé à tabac par un groupe d'individus le 2 juin en marge d'une manifestation à Eskisehir, a ajouté l'agence.

Grièvement blessé à la tête et souffrant d'une hémorragie cérébrale, l'étudiant avait succombé le 10 juillet, après avoir passé 38 jours dans le coma.

Cinq des suspects, dont un policier, ont été écroués pendant l'été dans le cadre de l'enquête.

La date de l'ouverture du procès devrait être fixée d'ici à un mois, a indiqué Dogan, précisant que les audiences pourraient être délocalisées dans une autre province de crainte de heurts autour du tribunal.

L'ouverture prévue lundi du procès d'un policier accusé d'un «homicide dépassant le cadre de la légitime défense» pour avoir abattu d'une balle dans la tête un manifestant le 1er juin à Ankara a été reportée en raison d'une violente altercation entre avocats de la défense et de la partie civile, a écrit mardi le quotidien libéral Radikal.

La Turquie a été secouée en juin par une vague d'actions de protestation antigouvernementales sans précédent depuis l'arrivée au pouvoir du parti islamo-conservateur du premier ministre Recep Tayyip Erdogan, en 2002.

Selon des évaluations de la police, quelque 2,5 millions de personnes sont descendues dans la rue dans près de 80 villes pendant trois semaines pour exiger la démission de M. Erdogan, accusé de dérive autoritaire et de vouloir «islamiser» la société turque.

Les manifestations ont été violemment réprimées par la police.

Les heurts ont fait six morts - un policier et cinq manifestants (le dernier ayant succombé au cours d'une manifestation en septembre) - et plus de 8000 blessés, d'après l'Union des médecins de Turquie.