La police grecque a annoncé lundi la démission de deux de ses généraux et ordonné une enquête sur des liens éventuels entre policiers et Aube dorée, six jours après le meurtre d'un musicien antifasciste par un membre présumé de ce parti néonazi.

Le ministère de l'Ordre public a accepté la démission de deux généraux, «l'inspecteur général de la police du sud du pays Ioannis Dakopoulos et le directeur général de la police du centre du pays Apostolos Kaskanis», a indiqué un communiqué ministériel.

De même, plusieurs cadres de la police en poste sur l'île d'Eubée, au nord d'Athènes, ont été suspendus pour ne pas avoir effectué une enquête sur des locaux d'Aube dorée situés près d'un commissariat de police, et où des armes auraient été entreposées.

Une enquête policière a été également ouverte pour déterminer si des policiers ont participé «d'une manière active à des activités illégales d'Aube dorée» après «des dénonciations dans la presse sur cette éventualité», souligne un communiqué de la direction de la police.

«Afin d'assurer (le déroulement de) cette enquête de manière objective, une dizaine de changements d'affectations dans la hiérarchie de la police, dont aux postes de chefs de l'unité antiterroriste et de l'unité chargée du crime organisé, ont été effectués», poursuit ce texte.

Dans le cadre de cette enquête réalisée par la Police des polices, une trentaine de dossiers constitués depuis le début de l'année sur «des actions illégales» de policiers vont également être réexaminés, selon une source policière.

L'assassinat, le 18 septembre près d'Athènes, d'un rappeur antifasciste, Pavlos Fyssas, 34 ans, par un néonazi et membre présumé d'Aube dorée, un camionneur de 45 ans, a consterné la Grèce et poussé les autorités à agir contre ce parti, qui dispose de 18 élus sur 300 au Parlement depuis juin 2012.

Organisation paramilitaire

Ayant bénéficié jusqu'ici d'une quasi-impunité de la part des autorités pour des violences contre des migrants et sympathisants de gauche, Aube dorée se trouve dorénavant dans la ligne de mire du gouvernement.

«Les autorités doivent faire preuve de fermeté pour lutter contre les violences néonazies après le tollé qu'a suscité ce meurtre, non seulement en Grèce, mais aussi à l'étranger», souligne à l'AFP la criminologue à l'Université de Thrace Sophia Vidali.

Mais elle redoute que ce coup de balai dans la hiérarchie policière ne soit insuffisant pour amener à une vraie remise en question, «compte tenu de la nécessité d'une restructuration profonde (...) de ce corps».

Plusieurs associations de défense des droits de l'Homme ont dénoncé par le passé le peu d'empressement des policiers de certains commissariats à agir face aux attaques perpétrées par des milices d'assaut néonazies dans des quartiers défavorisés d'Athènes et d'autres villes.

Un témoignage d'un ex-membre d'Aube dorée dans le quotidien Ethnos décrivait lundi «l'organisation paramilitaire» du parti, «la formation des milices d'assaut» et leur entraînement par d'ex-militaires.

Pour certains observateurs, la police a ainsi saisi l'occasion après l'assassinat de Pavlos Fyssas de procéder à «un nettoyage» nécessaire au sein de ses services. «Le gouvernement grec semble enfin sensibilisé au rôle des néonazis», souligne dans son éditorial lundi Le journal des rédacteurs.

Aube dorée, qui ne cache pas ses orientations xénophobes et antisémites, a consolidé ses positions ces dernières années en surfant sur la grave crise économique qui frappe la Grèce, les baisses de salaires, et le discrédit croissant de la classe politique.

Toutefois, les derniers sondages publiés lundi dans la presse montrent que la cote de popularité du parti est à la baisse, depuis l'assassinat qui lui est imputé. Il recueille aujourd'hui moins de 8% des intentions de vote, contre 13% avant le drame.