Le rival de la chancelière allemande Angela Merkel, le social-démocrate Peer Steinbrück, a choqué l'Allemagne jeudi soir avec une photo de lui faisant un doigt d'honneur, en une d'un magazine à dix jours des législatives.

Questionné par le magazine du quotidien de centre gauche Süddeutsche Zeitung, sur les surnoms dont il avait été affublé après ses diverses gaffes de communication pendant la campagne, cet ancien ministre des Finances de Merkel dans un gouvernement de grande coalition entre 2005 et 2009 a répondu par ce geste inattendu.

Il avait accepté de participer à cette séance photo, dite «interview muette», réalisée une fois par semaine avec des personnalités différentes. Le principe est de répondre à des questions par des gestes immortalisés en noir et blanc par un photographe.

L'image, qui fait la couverture de l'édition de vendredi du SZ Magazin, a été rendue publique jeudi soir et a immédiatement déchaîné la twittosphère.

Le ministre allemand de l'Économie, Philipp Rösler (parti libéral, FDP) a immédiatement attaqué le social-démocrate en marge d'un rassemblement électoral. «Un tel geste n'est pas possible de la part d'un candidat à la chancellerie», a-t-il dit, cité par l'agence DPA.

«Peer Steinbrück fait un doigt d'honneur à l'Allemagne», s'offusquait le quotidien conservateur Die Welt sur son site internet, ajoutant : «une telle chose ne s'est jamais produite, un candidat à la chancellerie qui fait sans gêne un doigt d'honneur pour répondre à une question lors d'une interview».

Sur twitter, les réactions étaient cependant partagées, avec quelques commentaires positifs, comme celui d'un certain «Opa Hans» : «on lui pose une question énervante où il doit répondre par geste, il fait un doigt d'honneur. So what?».

Interrogé par l'AFP, Gero Neugebauer, politologue de l'Université Libre de Berlin, se disait «peu surpris» par le geste de M. Steinbrück : «c'est assez typique de sa part».

Selon lui, les sympathisants SPD ne devraient pas se détourner de leur parti pour autant : «ce qui compte pour eux, c'est sa compétence, ses idées pour le marché de l'emploi, la justice sociale».

D'après la Süddeutsche Zeitung, le porte-parole de M. Steinbrück a voulu empêcher la parution de cette photo. Mais le candidat social-démocrate lui-même aurait insisté pour qu'elle ne soit pas bloquée. «Non, c'est bon», aurait-il déclaré, selon le journal.

Dans un tweet publié jeudi soir, M. Steinbrück a expliqué son geste : «Parler franchement n'a pas toujours besoin de mot. Par exemple quand on est constamment interrogé sur des choses ennuyeuses au lieu d'être interpellé sur les questions vraiment importantes».

Et le président du SPD, Sigmar Gabriel, a déclaré de son côté : «M. Steinbrück a montré ses émotions de façon ironique dans une interview-photo ironique».

Le doigt d'honneur de M. Steinbrück a désormais son compte twitter «Peers Finger» (le doigt de Peer).

Depuis l'annonce de sa candidature fin septembre 2012, Peer Steinbrück n'a jamais vraiment réussi à inquiéter la chancelière Angela Merkel, largement favorite pour décrocher un troisième mandat après les législatives du 22 septembre.

Alors que la conservatrice Merkel a toujours caracolé en tête des sondages de popularité - le distançant de 20 à 30 points -, cet économiste réputé pour son franc parler a accumulé les bourdes.

Il avait notamment été épinglé pour avoir dit qu'il n'achèterait «jamais une bouteille (de vin) à seulement cinq euros (environ 7 $)» - pas assez bon pour lui -, lors d'une discussion consacrée au montant des allocations familiales. Puis, il avait déclenché une controverse en jugeant «insuffisant» le salaire de chancelier compte tenu des responsabilités.

Après son unique duel télévisé avec Mme Merkel, le 1er septembre, M. Steinbrück était un peu remonté dans les sondages avec 26 % de popularité, contre le double pour sa rivale.

Mardi dernier, Mme Merkel avait fait part de sa sympathie pour M. Steinbrück, dont elle avait dit «apprécier le sens de l'humour».

PHOTO SÜDDEUTTSCHE ZEITUNG

Questionné par le magazine du quotidien de centre gauche Süddeutsche Zeitung, sur les surnoms dont il avait été affublé après ses diverses gaffes de communication pendant la campagne, Peer Steinbrück a répondu par ce geste inattendu.