La défense de Francesco Schettino a demandé mercredi une nouvelle fois au tribunal de Grosseto, en Toscane, un accord à l'amiable pour le commandant du Costa Concordia, après un premier refus essuyé en mai dernier.

«Nous avons réitéré notre demande d'un accord à l'amiable. Nous ne nous attendons pas à une réponse immédiate» du tribunal, a déclaré Francesco Pepe, l'un des avocats de celui qui est considéré comme le principal responsable du naufrage qui a fait 32 morts en janvier 2012.

Un autre avocat, Domenico Pepe, a précisé que leur proposition portait sur une peine de trois ans et cinq mois de prison pour Francesco Schettino en échange d'une reconnaissance partielle de culpabilité dans la catastrophe.

Le Parquet de Grosseto s'est exprimé contre cet éventuel accord à l'amiable, mais le dernier mot revient au tribunal qui n'a aucune date limite pour prendre sa décision.

Alors que la défense du commandant Schettino fait son possible pour limiter les risques encourus par leur client, les victimes du naufrage du Costa Concordia sont venues réclamer justice à l'ouverture de son procès.

«Nous sommes ici aujourd'hui pour obtenir justice pour les victimes et notamment pour ceux qui devront vivre toute leur vie avec un sentiment d'angoisse», a déclaré à l'AFP Francesco Di Ciollo, avocat de deux des victimes italiennes, peu avant l'ouverture du procès de Francesco Schettino, seul sur le banc des accusés.

«Mes enfants ne veulent plus ni prendre l'avion ni monter sur un bateau depuis cet accident, ils sont traumatisés. Le plus grand se rappelle très bien cette nuit, il a fait des cauchemars pendant des mois», a raconté Gianluca Gabrielli, un Romain de 33 ans qui se trouvait sur le paquebot avec sa femme et ses deux enfants la nuit du drame.

Plus de 400 témoins et 250 parties civiles seront cités dans le cadre de ce procès-fleuve, prévu pour durer des mois.

Objet de toutes les critiques, surnommé «l'homme le plus détesté d'Italie» ou «Capitaine couard», Francesco Schettino est poursuivi pour homicides multiples par imprudence, abandon de navire et dommages causés à l'environnement.

«Il n'a pas abandonné le navire. Si le commandant était resté dix minutes de plus sur le navire, il serait tombé à l'eau et n'aurait pas pu gérer l'évacuation», a assuré Donato Laino, l'un de ses avocats.

Cinq autres personnes mises en cause ont en revanche obtenu le feu vert du Parquet pour une peine négociée avec le tribunal : le directeur de l'unité de crise du Costa, le timonier indonésien et trois autres membres de l'équipage. La justice se prononcera à ce sujet samedi.

«C'est injuste, car ils proposent des sentences qui n'ont rien de comparable avec leur énorme responsabilité. Le plus grand responsable c'est la compagnie Costa Concordia, mais elle n'est pas sur le banc des accusés», s'est insurgé Me Massimiliano Gabrielli, membre d'un groupe d'avocats baptisé «justice pour le Concordia», qui représente une centaine de passagers. Même sentiment de la part de la présidente française du collectif SOS Concordia qui a refusé de se déplacer pour un procès «tronqué». «Le capitaine n'a jamais fait qu'une manoeuvre autorisée par Costa», a-t-elle dit à un journaliste de l'AFP.

La compagnie a été condamnée en avril à verser une amende d'un million d'euros (environ 1,4 million de dollars) au terme d'une procédure négociée au cours de laquelle elle a reconnu sa responsabilité administrative, ce qui lui permet d'échapper à un procès au pénal.

La jeune Moldave qui se trouvait sur le pont aux côtés de Francesco Schettino au moment du naufrage, Domnica Cemortan, qui juge aussi que «le commandant n'est pas l'unique responsable», est citée comme témoin.

Dans la nuit du 13 janvier 2012, le Costa Concordia, un paquebot de 114 500 tonnes, avait heurté un écueil près de la côte et s'était échoué sur des rochers à quelques dizaines de mètres de l'île toscane du Giglio avec à son bord 4229 personnes, dont 3200 touristes. Trente-deux personnes avaient trouvé la mort, dont deux n'ont jamais été retrouvées. Parmi les 250 parties civiles figurent Costa Croisières (groupe Carnival), propriétaire du navire, l'État italien ainsi que l'île du Giglio, où l'énorme épave gît encore près du port, couchée sur le flanc. Selon l'avocat du ministère de l'Environnement, Patrizia Pena, les dégâts sont évalués pour l'instant à 12,5 millions d'euros (17,1 millions de dollars), un chiffre qui peut se révéler encore «bien plus élevé».

Des dizaines de rescapés ont en outre entamé des poursuites devant des tribunaux civils contre Costa. La plupart de ceux qui n'ont pas été blessés ou n'ont pas perdu de proches ont accepté une indemnisation standard d'environ 11 000 euros (15 000 $) proposée par Costa. Quant au renflouement de l'épave, il est prévu pour septembre, mais pourrait être reporté pour la énième fois.