Trains et métros à l'arrêt, administrations fermées, transports aériens perturbés: le Portugal a tourné jeudi au ralenti en raison d'une nouvelle grève générale contre l'austérité, la quatrième depuis que le pays vit sous assistance financière internationale.

«Les objectifs de la grève ont été atteints», a déclaré à la presse Carlos Silva, secrétaire général de la centrale syndicale UGT, qui a appelé à cette journée de mobilisation avec la CGTP, proche du Parti communiste.

«Notre objectif était de dire stop aux politiques d'austérité», a-t-il ajouté se félicitant de la «forte mobilisation», notamment dans le secteur public.

Il a estimé le taux de participation «supérieur à 50% du total des actifs», soit sur un peu plus de «cinq millions de personnes ... dont plus d'un million de chômeurs».

Un peu plus tôt, Arménio Carlos, le leader de la CGTP, avait évoqué «une grève générale exceptionnelle» accusant le premier ministre, Pedro Passos Coelho, d'être «le plus grand exterminateur de l'emploi». La centrale syndicale devait faire un bilan un peu plus tard.

Il s'agit de la deuxième grève nationale organisée conjointement par les deux confédérations depuis celle de novembre 2011, cinq mois après l'arrivée au pouvoir du gouvernement de centre droit pour mettre en oeuvre le plan d'aide international négocié il y a deux ans. La CGTP avait convoqué seule celles de mars et de novembre de 2012.

Cette grève a été ponctuée de manifestations à travers le pays, celle de la capitale ayant rassemblé quelques milliers de personnes qui ont défilé jusqu'au parlement.

«Nous sommes dans la rue pour faire tomber le gouvernement», scandaient les manifestants, dont certains brandissaient des pancartes sur lesquelles était écrit: «Basta!» ou encore «troïka et gouvernement dehors!».

Quelques incidents ont été signalés à la fin de la mobilisation. Une centaine de manifestants a quitté le parlement et traversé la ville pour bloquer le pont 25 Avril, qui relie les banlieues sud à la capitale. Ils ont été empêchés par la police quelques mètres avant la bretelle d'accès au pont.

Un militant a dit à l'AFP que cette initiative était «partie de trois groupes anarchistes».

Sous le regard de la «troïka»

Cette journée de mobilisation a été décidée après l'annonce par le gouvernement d'un nouveau train de mesures d'austérité visant surtout les fonctionnaires, qui verront leur horaire de travail hebdomadaire passer de 35 à 40 heures, et dont environ 30.000 postes seront supprimés pour réduire les dépenses publiques de 4,7 milliards d'euros d'ici la fin 2014.

Les politiques de rigueur ont augmenté plus que prévu la récession. L'économie portugaise, en recul depuis deux ans, doit encore se contracter cette année de 2,3% tandis que le chômage doit atteindre le taux record de 18,2%.

Cette situation a accru le mécontentement. Mais malgré son isolement croissant au Portugal, M. Passos Coelho bénéficie toujours de l'appui des créanciers du pays, qui ont récemment accepté d'assouplir les objectifs budgétaires prévus par le plan de sauvetage financier de 78 milliards accordé en mai 2011 par l'Union européenne (UE) et le Fonds monétaire international (FMI).

Cette grève générale s'est déroulée sous le regard de la «troïka» (UE-BCE-FMI) des bailleurs de fonds qui a entamé lundi une mission à Lisbonne pour préparer la prochaine évaluation trimestrielle devant débuter le 15 juillet.

Toutefois, l'espoir des deux centrales d'étendre le mouvement au secteur privé, faiblement syndicalisé, a semblé déçu.

«Les chiffres pour le privé n'atteignent pas ceux de l'administration publique», a admis le secrétaire général de l'UGT.

«Le pays n'est pas à l'arrêt», a répliqué le porte-parole du gouvernement, Luis Marques Guedes, à l'issue du Conseil des ministres hebdomadaire. Refusant «une guerre des chiffres» avec les syndicats, le gouvernement s'est abstenu de donner une estimation sur la participation.

La production a été arrêtée dans la grande usine Volkswagen des environs de Lisbonne, «Auto Europa», tandis que, selon la CGTP, le «secteur de la santé a adhéré en force» évoquant une participation proche de 80% parmi les infirmiers. Seules les interventions urgentes étaient assurées.

Selon le gestionnaire des aéroports, ANA, 80 vols ont été annulés, dont 56 à Lisbonne, et de nombreux retards ont été signalés.