Les services secrets britanniques ont subi un nouveau revers dimanche avec la confirmation que le Kenya avait arrêté en 2010 un des suspects islamistes du meurtre d'un militaire à Londres, alors que la piste terroriste était également privilégiée dans l'agression ce week-end d'un soldat en France.

«À ce stade» aucun lien n'a été établi entre les deux attaques qui se sont déroulées à trois jours d'intervalle, a affirmé le président français François Hollande. Mais «nous devons regarder toutes les hypothèses», a-t-il immédiatement ajouté.

De leur côté, les services secrets britanniques faisaient face dimanche à de nouvelles révélations extrêmement embarrassantes.

Michael Adebolajo, l'un des deux suspects dans le meurtre à coups de couteau et de hachoir mercredi à Londres, avait été arrêté en 2010 sur la côte kényane, non loin de la Somalie où opèrent les insurgés islamistes shebab affiliés à Al-Qaïda, a rapporté la presse britannique.

Une interpellation ensuite confirmée par le porte-parole du gouvernement kényan et le ministère britannique des Affaires étrangères.

Le jeune homme était soupçonné de liens avec les shebab, a précisé un policier antiterroriste kényan sous couvert d'anonymat.

Mais il «n'a pas été poursuivi, nous l'avons remis au représentant local du MI5», les services de renseignements britanniques, a ajouté M. Kariuki. «Nous lui avons fourni l'assistance consulaire que nous accordons normalement aux citoyens britanniques», a déclaré pour sa part une porte-parole du Foreign Office.

Ces révélations soulèvent de nouvelles interrogations sur les informations dont disposaient les services secrets et la police britanniques sur les deux suspects, issus de familles d'origine nigériane et chrétienne mais convertis à l'islam. Vendredi déjà, une personne se présentant comme un ami de Michael Adebolajo, Abou Nusaybah, avait affirmé sur la BBC que le MI5 avait tenté de recruter le jeune homme à son retour du Kenya.

Un rapport préliminaire sur d'éventuelles failles du système doit être remis cette semaine, à la demande du premier ministre David Cameron.

La ministre de l'Intérieur, Theresa May, sous pression, a aussi évoqué dimanche la possibilité de renforcer la législation encadrant les groupes radicaux, estimant que des «milliers» de personnes étaient menacées de tomber dans l'extrémisme au Royaume-Uni.

Selon elle, «toutes les indications» laissent penser que «le meurtre terrifiant» de mercredi était l'oeuvre de personnes isolées.

Dans le cadre de l'enquête qui mobilise 500 personnes, Scotland Yard a procédé dimanche à une nouvelle arrestation pour «complicité de meurtre», portant à quatre le nombre de personnes en garde à vue, tandis que les deux principaux suspects, blessés lors de leur interpellation, étaient toujours hospitalisés.

Dans une vidéo à la rhétorique inspirée du jihadisme, Michael Adebolajo, les mains couvertes de sang, avait expliqué avoir agi en représailles au fait que «des musulmans sont tués quotidiennement par des soldats britanniques».

Le militaire britannique qu'il a tué à proximité d'une caserne ne portait pas d'uniforme au moment de l'attaque. À Paris en revanche, le soldat français attaqué samedi patrouillait en tenue au moment où il a été blessé à l'arme blanche. Son agresseur s'est enfui et on ignore s'il partageait ou non les convictions islamistes des suspects du meurtre de Londres.

À Paris, «on a voulu tuer un militaire parce qu'il était militaire», a déclaré le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian.  «Nous poursuivons une lutte implacable contre le terrorisme et contre tout acte qui remettrait en cause notre sécurité», a-t-il ajouté, alors que l'enquête était reprise par le parquet antiterroriste de Paris.

Le soldat français, dont les jours n'étaient pas en danger dimanche, a été frappé par-derrière par un homme qui lui a porté un coup au niveau de la nuque, selon le procureur qui a évoqué «une arme blanche», sans en préciser la nature.

Les policiers exploitent notamment témoignages et images de vidéosurveillance. Selon une source proche du dossier, «toutes les bandes vidéos ont été récupérées et elles sont nombreuses» dans la zone où s'est produite l'agression.

Les enquêteurs ont aussi procédé à plusieurs auditions, mais les témoignages semblent s'être avérés assez contradictoires, y compris sur la tenue vestimentaire de l'agresseur. Décrit comme un homme d'environ 1 mètre 90, portant une barbe, il a agi par surprise et n'a rien dit.