Le Vénézuélien Carlos, figure du terrorisme international, a surpris lundi la cour d'appel qui le rejuge pour quatre attentats meurtriers commis il y a trente ans, en annonçant avoir interdit de procès ses avocats pour protester contre le manque de soutien des autorités du Venezuela.

Visiblement pas inquiet pour sa défense, Ilich Ramirez Sanchez, 63 ans, a obtenu, comme le prévoit la procédure, la désignation de trois jeunes avocats commis d'office, qu'il se fait fort d'initier aux arcanes d'une instruction vieille de trente ans.

«Ils ne connaîtront pas le dossier, mais moi je le connais, ça affaiblira un peu la défense, mais on va se débrouiller», a commenté le sexagénaire, fine moustache, veste noire, chemise blanche, foulard et pochette assortis.

Carlos accuse le gouvernement du Venezuela de «sabotage» parce qu'il refuserait de prendre en charge les frais du procès. «J'ai interdit à mes avocats de venir me défendre» tant que durerait cette situation, a-t-il déclaré à l'ouverture des débats devant la cour d'assises spéciale d'appel de Paris.

C'est Me Isabelle Coutant-Peyre, avec laquelle Carlos a noué une union religieuse sans valeur légale, qui aurait dû assurer sa défense comme elle le fait depuis plusieurs années aux côtés de Me Francis Vuillemin. Mais ni l'un, ni l'autre ne se sont présentés devant la cour.

Jointe lundi en fin de journée par l'AFP, Me Coutant-Peyre a indiqué revenir de Caracas où elle a tenté de débloquer les choses, mais «c'est très compliqué», s'est-elle contenté de dire.

Fin 2011 encore, le président Hugo Chavez qualifiait Ilich Ramirez Sanchez de «digne héritier des plus grandes luttes» pour les peuples. Le procès en première instance avait toutefois été aussi marqué par des tensions autour du financement de la défense.

Le successeur du défunt Hugo Chavez, Nicolas Maduro, a été élu en avril et Me Vuillemin avait dénoncé, dans des déclarations à l'AFP, avant le procès, la «peur» d'un «groupe de hauts fonctionnaires» vénézuéliens de voir Carlos revenir un jour dans son pays.

«Révolutionnaire professionnel»

Ses trois nouveaux avocats, le plus novice ayant prêté serment en 2012, ne bénéficieront d'aucun délai pour se plonger dans les 80 tomes de la procédure : leur demande de report d'une semaine du procès, prévu jusqu'au 26 juin, a été refusée.

En attendant, Carlos a pris sa défense en main, d'humeur badine avec le président Régis de Jorna qui ne s'est pas privé de le recadrer plusieurs fois, lui rappelant que «nous ne sommes pas une bande de copains», lorsqu'il s'obstine à interpeller les parties par leur nom plutôt que par leurs fonctions d'avocat général ou d'avocat.

Carlos est jugé en appel pour complicité dans quatre attentats commis en France en 1982 et 1983 qui ont fait onze morts et quelque 150 blessés, dans un train Paris-Toulouse, rue Marbeuf à Paris, à Marseille, gare Saint-Charles, contre un TGV Marseille-Paris à Tain-L'Hermitage.

En décembre 2011, la justice française l'a condamné pour ces faits à la perpétuité assortie de 18 ans de sûreté, peine maximale. Détenu en France depuis 19 ans, il purge déjà une peine de prison à vie prononcée en 1997 pour le meurtre en 1975 à Paris de trois hommes, dont deux policiers.

L'Allemande Christa Frohlich, 70 ans, rejugée pour un seul attentat après avoir été acquittée en première instance, a informé la cour qu'elle ne comptait pas se déplacer d'Allemagne où elle vit aujourd'hui.

«Vous savez très bien que je suis révolutionnaire professionnel», a déclaré Carlos à la cour, interrogé sur sa profession. Il a cependant toujours nié une quelconque implication dans les quatre attentats.

smk/at/st/bds