La principauté de Monaco est à l'étroit dans ses 2 km2. Elle veut s'étendre de six hectares dans la mer pour y construire des logements de luxe afin d'attirer une clientèle internationale fortunée, tout en préservant une réserve marine protégée se trouvant à proximité.

L'équation est compliquée pour ce petit État qui vient de lancer un appel à candidatures pour son projet d'extension territoriale, dont la première étape sera la construction d'une immense «dalle» sous-marine d'un coût d'un milliard d'euros, avec une réalisation globale et finale espérée vers 2024.

Sur une carte du littoral monégasque, le gouvernement a délimité une surface où pourra se loger le nouveau quartier, jouxtant une salle de spectacles et de congrès, le «Grimaldi Forum».

Le souverain Albert II de Monaco s'est engagé à préserver l'environnement marin. Mais à seulement vingt mètres sur la droite du futur quartier, débute la réserve marine du Larvotto, fierté de la principauté. Elle abrite «une biodiversité très riche où se sont multipliés les mérous bruns, des posidonies et des grandes nacres qu'il faut préserver», note Marie-Pierre Gramaglia, conseillère de gouvernement (ministre) à l'Équipement.

Et à quarante mètres sur la gauche se situe le «tombant des Spélugues», avec ses cavernes sous-marines où s'épanouit le corail qui a «besoin d'oxygénation», précise-t-elle.

Entre ces deux univers protégés doit surgir dans une dizaine d'années un nouveau quartier d'immeubles de 6 à 10 étages, comprenant logements de grand luxe, stationnements sous-marins, commerces, bureaux et une marina d'une quarantaine d'anneaux. En tout, 60 000 m2 de surfaces vendables, hors espaces extérieurs.

Au préalable, le constructeur retenu devra préparer à vingt mètres de fond un socle pouvant soutenir toutes ces constructions. Différentes techniques sont possibles, comme un remblaiement ou la pose de caissons flottants acheminés par la mer puis immergés, une solution qui serait moins violente pour la circulation des courants marins.

Sortie de crise pour Monaco

En échange de cet investissement colossal, l'opérateur disposera de droits à construire, même s'il devra notamment rétrocéder à l'État certaines surfaces bâties ou non bâties.

Une fois la sélection du constructeur faite, ce dernier disposera de douze mois de négociations avec l'État pour finaliser son offre globale.

En 2008, la principauté avait renoncé à un projet d'extension sur la mer, deux fois plus grand, en raison de la crise économique, mais aussi de la proximité de la réserve marine.

À l'époque, deux groupements devaient encore être départagés. D'un côté Daniel Libeskind (maître d'oeuvre de la reconstruction du World Trade Center à New York), associé avec l'architecte Arata Isozaki et les constructeurs néerlandais Van Oord-Dragados et belge BESIX. De l'autre, un groupement comprenant l'architecte britannique Norman Foster, les constructeurs italiens Saipem et français Bouygues, ainsi que l'actionnaire monégasque Michel Pastor.

Pour le ministre d'État (chef du gouvernement) Michel Roger, le lancement d'un nouveau projet est possible, car «Monaco est sorti de la crise». «Nous sommes revenus à des fondamentaux sains», juge-t-il, en parlant d'«acte d'optimisme sur l'avenir économique du pays».

La principauté estime avoir besoin de 350 000 m2 supplémentaires tous les dix ans pour son développement.

Dans les années 60, un quartier d'affaires et d'habitations, dit «de Fontvieille», à l'ouest, avait déjà été construit sur la mer avec des remblais, sur 22 hectares.

Il n'y a pratiquement plus de terrains vides à Monaco et les anciennes constructions sont détruites pour construire des immeubles plus hauts, comme c'est le cas actuellement avec «La Tour Odéon». Elle culminera à 170 mètres sur 49 étages et ses logements devraient être commercialisés en moyenne à 50 000 euros/m2, contre 30 000 euros/m2 en principauté.