Les Verts, troisième force politique d'Allemagne, ont mis samedi la barre à gauche et emboité le pas des sociaux-démocrates, en dénonçant la politique d'austérité de la chancelière Angela Merkel, dans l'espoir de battre le gouvernement conservateur-libéral aux législatives de septembre.

«Nous voulons enfin renvoyer chez elle la coalition» de Merkel, a lancé la coprésidente des écologistes, Claudia Roth, lors d'un congrès de trois jours à Berlin, appelant son parti et le SPD «à mobiliser leur potentiel» pour que le prochain gouvernement soit «rouge-vert».

«La devise du gouvernement Merkel ''économiser, économiser, économiser'' doit être stoppée», a lancé le coprésident des Verts, Cem Özdemir, comparant la chancelière à un maître nageur qui regarderait se noyer les baigneurs (les pays de la zone euro, victimes de la crise), en se contentant de leur apprendre à nager au lieu de sauter à l'eau pour les sauver.

Le chef des sociaux-démocrates, Sigmar Gabriel, a de son côté averti l'Allemagne, «championne des exportations», que la crise économique allait l'atteindre si une telle politique d'austérité en Europe était poursuivie. «Le régime imposé par Merkel en Europe a, entre-temps, depuis longtemps conduit à l'anorexie», a lancé M. Gabriel.

Enjoignant les militants à «redonner espoir aux gens», Gabriel, très applaudi, a promis d'insuffler une nouvelle politique à l'Allemagne et l'Europe alors que les appels en Europe se sont multipliés cette semaine pour infléchir la politique d'austérité préconisée par Berlin pour résoudre la crise de la dette de la zone euro.

M. Gabriel était le premier dirigeant SPD de l'histoire des deux partis à tenir un discours à un congrès des Verts, comme de son côté Mme Roth, à un congrès du SPD, il y a quinze jours.

Le SPD est crédité de 23 à 26 % des suffrages, et les Verts entre 14 et 15 %, selon les sondages. Les conservateurs de Mme Merkel, très populaire dans son pays pour sa gestion de la crise de l'euro, obtiendraient, eux, entre 38 et 42 %, et les Libéraux, entre 4 et 5 %.

Dans leur programme électoral, qui doit être adopté à l'issue du congrès dimanche, les Verts ont résolument mis l'accent sur la lutte contre les injustices sociales, en plus d'une meilleure politique environnementale. Comme le SPD, ils réclament un salaire minimum généralisé d'au moins 8,50 euros de l'heure, dans un pays qui en est jusqu'ici dépourvu.

Les écologistes veulent également mettre davantage à contribution les citoyens les plus fortunés, notamment en relevant le taux maximum d'imposition à 49 % - contre 42 % actuellement - pour les revenus annuels de 80 000 euros ou plus, et en introduisant progressivement un impôt sur la fortune.

Malgré les déclarations en faveur d'une alliance des dirigeants des deux formations, un certain scepticisme persiste chez de nombreux Verts et leurs sympathisants des chances aux législatives du SPD, plombé notamment par l'impopularité de son candidat Peer Steinbrück.

Et alors qu'il était impensable pour les écologistes de Joschka Fischer en 1998 ou 2002, après leurs victoires avec le SPD de Gerhard Schröder, de s'allier avec les conservateurs, cette option n'est plus un tabou, surtout depuis que Mme Merkel a entamé en 2011 l'abandon progressif de l'énergie nucléaire en Allemagne, dans le sillage de la catastrophe de Fukushima.

En réponse aux doutes de certains Verts, M. Gabriel a reconnu: «naturellement, nous ne sommes pas des partis frères, chacun a ses racines et ses propres convictions». Et de dédramatiser par une pirouette humoristique les éventuelles discussions de leurs deux formations avec d'autres: «c'est normal, quand on veut s'installer à deux dans un nouvel appartement, que l'on regarde aussi ailleurs».

Il a conclu son discours en offrant à M. Özdemir un sac à dos vert et à Mme Roth, un rouge et s'est vu de son côté remettre par les deux dirigeants écologistes une tasse à café verte et pour sa fille, une grenouille en peluche verte «censée se transformer en prince charmant vert, le jour où elle l'embrassera».