Le président Nicos Anastasiades a indiqué dimanche que Chypre se préparait à proposer aux investisseurs étrangers s'étant vu ponctionner 3 millions d'euros ou plus dans le cadre du plan de sauvetage européen, de devenir citoyens de l'île méditerranéenne.

«Les investisseurs non résidents qui détenaient des dépôts avant le 15 mars 2013 et ont essuyé des pertes atteignant au moins trois millions d'euros seront éligibles pour demander la nationalité chypriote», a déclaré M. Anastasiades à l'ouverture d'une conférence sur les investissements russes à Chypre.

Le président, élu mi-février, a dit aux hommes d'affaires russes réunis à Limassol «partager leur amertume et leur appréhension compréhensibles causées par la façon dont l'accord de l'Eurogroupe a été imposé à mon gouvernement».

Chypre, au bord de la faillite a dû accepter, en échange d'un prêt international de 10 milliards d'euros, des contreparties draconiennes dont une réduction drastique de son secteur bancaire, importante source de revenus pour l'île.

La plus grosse banque de Chypre est en cours de restructuration, la deuxième en cours de liquidation, et leurs plus gros déposants ont été très largement ponctionnés, dans une tentative de mettre à contribution les nombreux investisseurs étrangers, notamment russes, qui opéraient via Chypre.

Afin «d'adoucir (...) les dégâts subis par la communauté d'affaires russe», le président a indiqué avoir soumis à son gouvernement une série de mesures qui doivent être validées lors d'un Conseil des ministres de deux jours débutant lundi.

Ces mesures prévoient, outre la possibilité de devenir chypriote pour ceux qui ont perdu 3 millions d'euros, un assouplissement des conditions d'attribution de la nationalité via des investissements.

Seront éligibles à la nationalité les personnes ayant investi 3 millions d'euros au lieu de 15 millions auparavant exigés, et pour ceux qui ont déjà demandé la nationalité dans ce cadre, leurs 15 millions d'euros d'investissements ne seront plus bloqués mais rendus accessibles.

«C'est vrai que pour un ressortissant russe, c'est intéressant d'avoir un passeport chypriote, parce que Chypre fait partie de l'Europe. Mais un passeport, ça ne solutionne pas le problème pour les entreprises, qui craignent qu'une telle mesure soit renouvelée, et il est très difficile de fonctionner à Chypre désormais», a réagi Vasily Novikov, un entrepreneur russe quinquagénaire basé à Chypre, interrogé par l'AFP à la conférence.

Pour Sergey Lozhkin, jeune membre de la société d'informatique First BIT, «c'est une idée intéressante, pas seulement à cause du passeport, mais parce que c'est un signe fort que Chypre veut rester proche de la Russie et des Russes».

Par ailleurs, a assuré M. Anastasiades, le «gouvernement examine divers scénarios qui permettraient des compensations pour une partie des pertes essuyées par des actionnaires de banques, des détenteurs de titres de créance et des déposants».

Il s'est dit convaincu que Chypre «gardera son rôle de plateforme internationale majeure d'investissement» notamment pour les sociétés russes.

«Je suis convaincu qu'il n'y aura pas de déplacement substantiels de fonds» hors de Chypre», a-t-il déclaré, tout en déplorant la façon dont des concurrents européens dans le secteur financier ont cherché à profiter de la crise bancaire à Chypre pour attirer des fonds vers leurs banques.

Évoquant les importantes réserves d'hydrocarbures découvertes dans les eaux territoriales chypriotes, le président a invité les «entreprises de la Fédération de Russie à (...) s'impliquer dans l'exploitation» de ces ressources.

M. Anastasiades a annoncé une visite en Russie du ministre chypriote des Affaires Kasoulides «sous peu», afin de préparer sa propre venue, à une date non précisée, afin de rencontrer Vladimir Poutine.