Un référendum pour ou contre l'énergie nucléaire en Bulgarie a certes donné dimanche une large majorité aux partisans de l'atome, mais est invalide en raison d'une bien trop faible participation, selon deux instituts de sondages.

Ainsi, d'après les estimations des instituts de sondages Gallup et Alpha Research, à peine de 20,5 à 21,8% d'électeurs ont voté, contre près de 60% à la même heure aux dernières élections législatives de juin 2009. Or, le résultat ne sera valide que si 4,35 millions de votants (environ 60%), autant que lors de ces législatives, se déplacent jusqu'aux urnes.

Pour ce premier référendum de l'histoire postcommuniste de la Bulgarie, les Bulgares votaient sur un projet bulgaro-russe de nouvelle centrale nucléaire à Béléné (nord), abandonné par le gouvernement en raison de son coût élevé: de 60,3% à 61% des votants se sont prononcés pour le «oui», d'après les deux instituts de sondages.

Si au moins 20% des 6,9 millions d'électeurs votent et si plus de la moitié d'entre eux se prononcent pour l'énergie nucléaire, le Parlement est tenu d'examiner la question dans un délai de trois mois. Mais, le gouvernement conservateur du premier ministre, Boïko Borissov, y dispose d'une majorité contre le projet de nouvelle centrale. Et Boïko Borissov a déclaré dimanche soir qu'il «fera de nouveau voter non» au Parlement.

Les partisans du projet Béléné, dont les socialistes et les nationalistes, soulignent que cette nouvelle centrale nucléaire permettrait de développer de hautes technologies, de créer des emplois et contribuerait à l'indépendance énergétique du pays. Ils estiment le coût du projet à 5,1 milliards d'euros.

Ses adversaires, dont le parti gouvernemental de centre-droit GERB et d'autres conservateurs qui sont ensemble majoritaires au parlement, ainsi que les écologistes, soulignent qu'il accroîtra encore plus la dépendance de la Bulgarie à l'égard de la Russie en matière énergétique. Ils évaluent le projet à plus de 10 milliards d'euros.

Dimanche, des tempêtes de neige dans le sud-est et le verglas dans tout le pays ont vraisemblablement découragé de nombreux électeurs.

De plus, la question sur l'avenir du nucléaire impliquait des connaissances d'expert qui ont provoqué la confusion: tant le coût du projet, son effet sur le prix et le marché de l'énergie, l'identification de l'investisseur que la part de l'État faisaient l'objet de diverses interprétations qui expliquent la part élevée des indécis.

La réponse ne faisait cependant pas de doute à Béléné, petite ville de 9.000 habitants qui compte sur le projet pour revivre: «Je vote +oui+ pour que nos enfants émigrés reviennent travailler ici», a déclaré Tsvetana Todorova, 58 ans, au chômage. «J'ai fait des études d'électronique nucléaire, mais je travaille comme vendeur. Ce projet a pour moi une importance vitale», a expliqué Dimitar Marinov, 27 ans, en faisant la queue devant un bureau de vote à Béléné.

«Je vote "non". Je ne suis pas opposé au nucléaire, mais à ce que la Russie impose ses intérêts», a pour sa part indiqué à Sofia Vesselin Mladenov, un traducteur de 53 ans.

La Bulgarie dépend presque entièrement des livraisons de gaz et de pétrole russes: sa seule raffinerie pétrolière est russe, sa seule centrale nucléaire à Kozlodoui (nord) a des réacteurs russes. À Béléné, au bord du Danube, près de la frontière avec la Roumanie, la Russie, via le groupe Atomstroyexport, compte installer des réacteurs de nouvelle génération pour la première fois dans un pays de l'Union européenne.

En fait, le référendum aura pour principal effet, selon les analystes, de resserrer les rangs des principaux partis en vue des législatives de juillet.