Le premier ministre David Cameron s'est engagé mercredi sous la pression des eurosceptiques à organiser d'ici la fin 2017 un référendum hautement controversé pour ou contre le maintien du Royaume-Uni dans une Union européenne réformée, au risque d'indisposer ses partenaires européens.

Le chef de file conservateur a soufflé le chaud et le froid dans un discours-clef prononcé dans la matinée à Londres, déclenchant des réactions mitigées de dirigeants du continent, encouragés par son credo européen, mais inquiets de ses prétentions à remodeler l'UE et promouvoir «une Europe à la carte».

«Je ne veux pas quitter l'UE. Je veux réformer l'UE», s'est énervé quelques heures plus tard M. Cameron, devant la chambre des Communes, pressé par le chef de l'opposition travailliste Ed Miliband, qui l'accusait de déstabiliser l'économie du pays en «créant de fortes incertitudes».

Des reproches également formulés par le vice-premier ministre Nick Clegg, chef de file des libéraux-démocrates europhiles, et qui rejoignent les inquiétudes des milieux d'affaires.

Dans une lettre ouverte, de grands patrons britanniques comme Richard Branson avaient récemment mis en garde contre toute «incertitude dommageable pour les entreprises britanniques».

Mais la Bourse de Londres a superbement ignoré le discours prononcé devant un parterre d'hommes d'affaires et de journalistes, au siège londonien de l'agence financière Bloomberg, en plein coeur de la City.

En revanche, l'allocution a sans surprise satisfait les influents conservateurs eurosceptiques ainsi que le UK Independent Party (UKIP) «séparatiste», en hausse dans les sondages.

David Cameron s'est inscrit dans la lignée d'un illustre prédecesseur, Winston Churchill, pour expliquer qu'après avoir «gagné la paix», l'UE devait «assurer la prospérité».

Mais c'est à une autre représentante tory, Margaret Thatcher, qu'il a emprunté des accents critiques à l'encontre d'une Europe qui suscite «le désenchantement». À ce titre, il a relevé les difficultés de la zone euro (à laquelle Londres n'appartient pas), la tentation de la supranationalité et «le fossé grandissant entre l'UE et ses citoyens».

«On ne peut pas tout harmoniser. Il n'est ni bon ni nécessaire de déterminer à Bruxelles les heures de travail des docteurs en milieu hospitalier», a ainsi dit Cameron.

S'affichant comme un fervent partisan à titre personnel du maintien de son pays dans l'édifice européen rejoint tardivement par son pays, en 1973, il s'est défendu d'être un «isolationniste» ou de briguer pour son pays un statut similaire à ceux de la Norvège ou de la Suisse.

Mais il a soutenu mordicus sa vision d'une UE «flexible, adaptable et ouverte». «Je ne veux pas juste un meilleur accord pour la Grande-Bretagne. Je veux un meilleur accord pour l'Europe aussi», a-t-il dit.

«Faute de réformes, le danger est que l'Europe échoue et que les Britanniques dérivent vers la sortie», a-t-il prévenu.

M. Cameron n'a pas énuméré précisément ses conditions au maintien dans l'UE de son pays, ou les prérogatives qu'il entend rapatrier, se contentant de mentionner «l'environnement, les affaires sociales et criminelles». «Rien ne doit être exclu» dans la renégociation, a-t-il cependant asséné.

«Quand nous aurons négocié un nouvel accord» sur les relations de la Grande-Bretagne avec l'UE, «nous offrirons aux Britanniques un référendum avec un choix très simple : rester au sein de l'UE sur cette nouvelle base ou en sortir complètement», a-t-il dit.

La consultation interviendra dans la première moitié de la prochaine législature qui commence en 2015, si toutefois M. Cameron obtient un second mandat.

«Il n'y a pas de doute que nous sommes plus puissants aux yeux de Washington, de Pékin ou de New Delhi parce que nous sommes un acteur puissant au sein de l'Union européenne», a-t-il concédé. «Si nous quittons l'Union européenne, ce sera un aller simple, sans retour», a-t-il averti.

Cette perspective d'un «Brixit», contraction de «British exit» a incité les grandes capitales européennes à temporiser.

La chancelière allemande Angela Merkel s'est dite «prête à discuter des souhaits britanniques», tout en rappelant «que d'autres pays ont aussi des souhaits» en insistant sur la nécessité «in fine d'un compromis équilibré».

Le président français François Hollande a également «manifesté son souhait» de voir la Grande-Bretagne rester dans l'UE, mais a insisté sur les «obligations» que cela entraînait, dont la «solidarité».

«Nous avons besoin d'un Royaume-Uni membre à part entière, qui ne reste pas ancré dans le port de Douvres», a dit le président du Parlement européen Martin Schulz.