Le gouvernement français réunit lundi et mardi à Paris une conférence nationale sur la pauvreté pour définir un «plan quinquennal» de lutte contre les exclusions qui menacent une fraction grandissante de la population, frappée de plein fouet par la crise.

La conférence qui s'achèvera par un discours du premier ministre Jean-Marc Ayrault suscite des attentes élevées parmi les associations qui ont travaillé à sa préparation.

L'objectif est de rendre plus efficace le dispositif d'aides sociales, compliqué et parfois mal connu, et de mobiliser l'ensemble des acteurs de la société -publics, privés, associations- pour prévenir le basculement dans la pauvreté des personnes et des familles qui traversent une passe difficile.

Le taux de pauvreté en France -concernant les personnes vivant avec moins de 964 euros par mois, soit 60% du revenu médian- était déjà de 14,1% en 2010, son plus haut niveau depuis 1997. Quant aux personnes en grande pauvreté (moins de 660 euros), elles étaient 4% de la population.

Le phénomène touche certes à des degrés divers l'ensemble des pays européens. L'Allemagne (15,8%) et le Royaume-Uni (16,2%) par exemple, connaissent aussi un taux de pauvreté important, pour ne pas parler de la Grèce (21,4%) ou de l'Espagne (21,8%).

Mais il continue de progresser et change de figure: il touche maintenant un enfant sur cinq et se transmet «de génération en génération», selon la ministre responsable du dossier Marie-Arlette Carlotti.

À côté des chômeurs, des travailleurs pauvres et des mères isolées, la Croix-Rouge voit aussi arriver dans ses centres des jeunes et des retraités, a témoigné l'un de ses responsables Didier Piard.

La préoccupation n'est pas nouvelle: en 2007 l'ancien président de droite Nicolas Sarkozy avait même promis de réduire d'un tiers la pauvreté.

Cinq ans plus tard, ni le président socialiste François Hollande, ni son premier ministre Jean-Marc Ayrault ne se hasardent plus à avancer des objectifs chiffrés.

En période de restrictions budgétaires, la marge de manoeuvre est étroite pour le gouvernement. Mais il a annoncé son intention d'engager une action coordonnée dans sept domaines sur lesquels des groupes de travail ont travaillé: emploi, accès aux minima sociaux, enfance, surendettement, logement, santé et gouvernance des politiques de solidarité.

Il s'agit notamment de remettre à plat les droits sociaux existants ou en faciliter l'accès.

Le RSA (revenu de solidarité active) par exemple, qui accorde sous conditions 475 euros par mois aux personnes sans revenus ou un complément de ressources aux travailleurs pauvres à temps partiel, est jugé compliqué, mal connu et stigmatisant. Environ 1,8 million de foyers le touchent, dont seulement 500 000 exerçant une activité alors qu'on en attendait trois fois plus.

Parmi les propositions des groupes de travail figurent aussi l'extension de la couverture maladie prise en charge par l'État pour les plus pauvres, et une meilleure indemnisation du chômage des travailleurs précaires ainsi qu'une pénalisation des employeurs qui recourent exagérément à des emplois de courte durée.

L'un des dossiers les plus difficiles concerne le logement, alors que 3,6 millions de personnes ne sont pas logées adéquatement et que 150 000 vivent dans la rue ou ont recours aux structures d'hébergement.

La ministre écologiste du Logement Cécile Duflot envisage de recourir d'ici à la fin de l'année à des réquisitions de locaux vides pour loger des sans-abri.

À plus long terme, l'objectif proposé est de produire 250 000 logements à vocation sociale et très sociale en 5 ans et de résorber les 400 000 à 600 000 logements potentiellement indignes.