La Grèce a lancé lundi sa délicate opération de rachat de dette qui ouvre la voie au versement d'une aide financière bloquée depuis des mois et vitale pour le pays, menacé d'asphyxie.

Au terme d'une inhabituellement brève réunion, les ministres des Finances de la zone euro ont fait le point sur cette opération, lancée dans la matinée par l'Agence de la gestion de la dette grecque (PDMA) auprès des créanciers privés.

Le chef de file de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker, s'est dit confiant dans le succès de cette opération, au terme de la réunion, refusant de donner plus de détails.

Les premiers résultats seront dévoilés le 13 décembre lors d'un prochain Eurogroupe à Bruxelles. Les ministres devront alors décider ou non de verser les tranches de prêts de l'UE et du FMI, gelés depuis juin et vitales pour éviter la cessation de paiement à la Grèce.

Cette opération est la première étape des efforts engagés pour ramener la dette grecque à 124% du PIB en 2020, comme convenu il y a une semaine avec le FMI. Pour cela, Athènes doit racheter une partie de sa dette à prix cassés à des investisseurs privés, sur une base volontaire, et ensuite l'effacer.

«Je n'ai pas d'inquiétude particulière, je crois que les calculs ont été faits de manière réaliste», a affirmé le ministre français Pierre Moscovici lors d'une audition conjointe avec son homologue allemand Wolfgang Schäuble au Parlement européen.

Les créanciers privés d'Athènes vont se voir proposer jusqu'à 10 milliards d'euros de titres du Fonds européen de secours en échange des obligations qu'ils détiennent.

Ils devront accepter une décote conséquente, puisque l'État grec a fixé une fourchette de rachat allant d'un plancher de 30,2% à 38,1% (selon les échéances des titres) de la valeur des obligations rachetées, à un plafond de 32,2% à 40,1%, a précisé l'agence grecque.

L'opération offre toutefois aux investisseurs une légère prime par rapport à la valeur de ces titres vendredi dernier sur le marché secondaire, où s'échange la dette déjà émise.

Elle porte sur des obligations arrivant à échéance entre 2023 et 2042, pour un montant global de quelque 62,3 milliards d'euros.

En mars dernier, quelque 107 milliards de créances détenues par des créanciers privés avaient été effacées. Les analystes estiment que cette fois, environ 20 milliards d'euros de dette grecque devraient l'être.

L'agence grecque a précisé que l'offre expirerait vendredi 7 décembre, pour un bouclage de l'opération dix jours plus tard.

Le ministre grec des Finances Yannis Stournaras a souligné vendredi dernier que le pays avait «un devoir patriotique» de réussir l'opération, dans un appel aux banques grecques à y participer.

Et, alors que la question de la capacité de la Grèce à supporter une dette aussi élevée a été au centre des débats ces dernières semaines, la chancelière allemande Angela Merkel n'a pas exclu dimanche, pour la première fois, un effacement dans quelques années. Ce sujet est particulièrement délicat en Allemagne à moins d'un an des élections législatives.

A l'Eurogroupe, les ministres ont également fait le point sur la situation de Chypre, qui a sollicité l'aide de l'UE et du FMI. La zone euro a appelé Nicosie et la troïka des créanciers (UE, BCE et FMI) à «conclure rapidement» un accord sur le programme d'aide et ses modalités.

«Les négociations ont bien avancé ces derniers temps avec la troïka», a indiqué M. Moscovici. Le sujet devrait une nouvelle fois être abordé la semaine prochaine avant une décision espérée début 2013.

Mardi, les ministres des 27 prennent le relais pour tenter d'avancer sur la mise en place d'un superviseur unique des banques de la zone euro, confiée à la Banque centrale européenne. Ils doivent trouver un compromis à présenter aux dirigeants européens lors du sommet des 13 et 14 décembre.

Les Européens peinent à s'entendre sur les moyens de prendre en compte les desiderata des pays non-membres de la zone euro, comme la Suède, qui veulent participer au mécanisme de supervision bancaire et avoir leur mot à dire.

Autre sujet de discorde: comment articuler le rôle d'institut monétaire de la BCE avec ses nouvelles activités de superviseur bancaire ?

«J'espère, même si je n'en suis pas sûr, que nous parviendrons à une position commune», a affirmé M. Schäuble. «C'est le grand dossier de ces deux jours», a souligné M. Moscovici.