Depuis une dizaine d'années, la Pologne est devenue en Europe le plus grand fournisseur d'objets nazis en tous genres. La majorité des acheteurs viennent de l'ancienne Allemagne de l'Est.

C'est un marché comme il y en a une dizaine à Gdansk, avec ses maraîchers, ses poissonniers et ses vendeurs de vêtements. Les clients déambulent, tranquillement, au milieu des étals.

Un petit bonhomme en fauteuil roulant fait lui aussi ses emplettes. Il s'appelle Marcin Kornak, il a la quarantaine, et sa mission est de repérer «tous les trucs qui n'ont rien à faire sur un marché populaire». Par «trucs», il faut comprendre tout l'attirail du parfait nazi: des croix gammées, des uniformes, des montres à gousset des Jeunesses hitlériennes, des casques de SS, des armes aussi. En cherchant bien, on peut aussi trouver des livres se rapportant à l'idéologie du IIIe Reich, et même de la musique.

«Et tout ça se passe sous les yeux des passants», s'énerve Marcin Kornak. En 1996, il a créé le collectif antifasciste Nigdy Wiecej («plus jamais ça») pour qu'on en termine, dit-il «avec toutes les formes modernes de racisme».

Et il y a du travail en Pologne... Depuis une vingtaine d'années, ce militant écrit dans un carnet tous les événements et les actes de violence commis par les militants d'extrême droite. «J'en suis à presque 3000, vous savez. Mais c'est aux politiciens de prendre les choses en main. Pour l'instant, les sanctions sont ridicules.»

Il est vrai que ce ne sont pas les quelques patrouilles de policiers en civil qui vont dissuader les commerçants de vendre de quoi satisfaire les nostalgiques d'Adolf Hitler.

Un simple commerce

Ces nostalgiques, ce sont surtout des gens d'Allemagne de l'Est. Là-bas, les objets à la gloire du nazisme sont systématiquement confisqués par la police. «Ils traversent la frontière et viennent s'approvisionner en reliques en tous genres, déplore M. Kornak. Ils font leur marché tranquillement, sans être inquiétés.»

Si les autorités polonaises ont profité de l'Euro de football pour faire le ménage sur les marchés du pays, il reste encore le problème des magasins militaires, identifiés par l'appellation Militaria. Leur commerce est légal tant qu'ils se limitent à vendre du matériel autorisé par le règlement. Voilà pour le texte. Mais la réalité est bien différente. Il suffit de demander discrètement au vendeur pour être servi en bustes d'Adolf Hitler. On peut même en choisir la taille.

Ces commerçants ont évidemment bien conscience qu'ils sont hors-la-loi, mais ils disent que c'est un «simple commerce». «Ça rapporte pas mal, oui», raconte un propriétaire de Militaria dans la cinquantaine.

Récemment, des milliers de reproductions d'artefacts ont ainsi été saisies par la justice allemande. Elles provenaient de la ville de Wroclaw, en Pologne.