Un couple bosnien a été arrêté après avoir maintenu en esclavage pendant huit ans une jeune Allemande, alors que des voisins et même la mère de la victime auraient été au courant, une affaire qui comporte beaucoup de zones d'ombre que la police n'a pas encore dissipées.

Cette fille aujourd'hui âgée de 19 ans, dont l'identité n'a pas été révélée de source officielle, a été libérée le 17 mai dans la bourgade de Karavlasi, près de Tuzla, dans le nord-ouest du pays, a affirmé dimanche la télévision nationale (FTV), citant la police et le parquet.

La police avait été alertée par un voisin, Sead Makalic, qui connaissait l'existence de la jeune fille. Le couple, Milenko et Slavojka Marinkovic, a été arrêté et placé en détention.

«Ils l'ont maintenue enfermée, ne lui permettaient pas d'entrer en contact avec d'autres personnes, ni d'aller à l'école. Ils lui ont fait subir des traitements inhumains et l'ont torturée», a dit un porte-parole de la police, Admir Arnautovic, à la FTV.

A Karavlasi, un journaliste de l'AFP a rencontré la mère de la victime, une femme d'une cinquantaine d'années qui s'est présentée comme Christine Siegner et a précisé que sa fille s'appelait Bettina.

«Tout est un mensonge. Nous vivions tous très bien ici. C'est une invention», a dit cette femme qui s'exprimait en allemand et a précisé qu'en Allemagne elle avait habité dans une «petite localité située entre Berlin et Hanovre».

Citant le parquet bosnien, la FTV affirme que la jeune fille a depuis été placée dans une «maison sûre» où elle est soignée par des médecins qui n'ont pas encore établi si elle avait été violée.

De son côté, M. Makalic, le voisin, a raconté à l'AFP des scènes de sévices que le couple Marinkovic et «leurs amis» avaient fait subir à la jeune fille.

«A l'époque, j'aidais les Marinkovic à construire leur maison et je ne me préoccupais pas de cette femme allemande qui venait d'arriver avec ses trois filles», a expliqué M. Makalic selon qui les deux soeurs de la victime auraient «épousé» entre-temps des frères de son geôlier.

Le villageois affirme avoir vu pendant des années «qu'ils l'obligeaient à tirer une charrette sur laquelle ils étaient assis. Ils l'avaient mise à la place du cheval et ils rigolaient». «Je suis sûr qu'ils l'ont violée», dit-il.

L'homme assure avoir vu la jeune Allemande manger du potiron et des graines de maïs que ses geôliers donnaient aux porcs.

Selon ce témoin, il s'agit d'une famille d'«origine rom où plusieurs frères habitent ensemble» et qui «voyagent souvent en Allemagne et en Autriche et se livrent à toutes sortes de trafic».

M. Makalic a dit qu'il n'avait pas remarqué la présence de la jeune fille depuis un an et que ses voisins lui disaient qu'elle était en Allemagne.

«J'avais alerté la police auparavant. Mais lorsque les policiers sont venus, ils l'avaient bien cachée. Quand je l'ai revue le 15 mai, j'ai pris une photo d'elle avec mon téléphone portable et j'ai alerté la police», assure-t-il.

Des habitants de la bourgade voisine de Gojcin ont raconté à la presse locale avoir entendu les «cris et pleurs» de la fille, qui laissaient supposer qu'elle avait alors été victime de sévices sexuels de la part d'«amis de la famille Marinkovic, qui venaient à la maison».

Des zones d'ombres subsistent sur la manière dont cette jeune Allemande est arrivée en Bosnie et la police ne les a pas encore dissipées.

D'après la presse locale, sa mère aurait conclu un mariage blanc avec Milenko Marinkovic, pour permettre à ce dernier d'obtenir un permis de séjour en Allemagne.