La Grèce, qui a fait le choix mardi de nouvelles élections, est venue une nouvelle fois bouleverser l'ordre du jour européen, marqué mardi par un premier sommet crucial à Berlin entre le nouveau président français François Hollande et la chancelière allemande Angela Merkel.

«Nous allons de nouveau vers des élections, dans quelques jours et dans de très mauvaises conditions», a affirmé le leader socialiste grec, Evangélos Vénizélos, à l'issue d'une réunion avec quatre autres chefs de partis politiques, convoquée par le président Carolos Papoulias.

«Les efforts en vue de la formation d'un gouvernement se sont conclus sans succès», a dans la foulée confirmé un communiqué de la présidence.

La réunion de mardi était la dernière carte dont disposait M. Papoulias pour constituer un gouvernement de «personnalités» afin de sortir la Grèce de l'impasse politique.

Cette annonce a immédiatement fait chuter l'euro, les Bourses européennes repassant de leur côté dans le rouge après un timide rebond dans la matinée, pour terminer presque toutes en baisse, sans pour autant céder à la panique.

«Cet échec ne constitue certes pas une surprise, mais assurément un risque de plus vers une éventuelle sortie de la Grèce de la zone euro», a jugé Alexandre Baradez, analyste chez Saxo Banque.

Cette hypothèse, qui n'a plus rien de tabou, a été évoquée par Christine Lagarde, la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), un des principaux créanciers de la Grèce.

L'impact d'une sortie de ce pays de la zone euro a été chiffré par le ministre français des Finances sortant, François Baroin, à quelque 50 milliards «net» pour la France.

M. Hollande a annoncé dans sa première allocution officielle vouloir «ouvrir une voie nouvelle en Europe». Il a aussi promis tout au long de sa campagne de remettre la croissance au premier rang des priorités en Europe, où la zone euro a officiellement échappé, de peu, à la récession, avec un premier trimestre affichant une croissance nulle.

Le nouveau président français a reçu mardi, le jour de son investiture, le soutien du Trésor américain qui s'est félicité du «nouveau débat sur la croissance en Europe». Washington souhaite depuis longtemps que l'Europe fasse davantage pour stimuler la croissance.

François Hollande et Angela Merkel, à la tête des deux principales économies en Europe, ont entamé mardi soir à Berlin un entretien où la Grèce et les moyens de relancer la croissance figuraient en tête.

Il s'agissait avant tout de «faire connaissance» pendant cette rencontre, selon la chancelière qui a ensuite dit à la presse qu'elle n'était que «la première» de toute une série.

Les deux dirigeants ont eu à coeur d'afficher leur harmonie sur le maintien de la Grèce dans la zone euro, mais ont reconnu des divergences sur la croissance, au cours d'une conférence de presse commune.Â

«Nous voulons que la Grèce reste dans la zone euro», a déclaré Mme Merkel. «Je souhaite comme Mme Merkel que la Grèce reste dans la zone euro», a renchéri M. Hollande.

La chancelière a affirmé que la France et l'Allemagne étaient «conscientes de la responsabilité qu'elles ont» pour l'Europe et que les deux pays avaient «le devoir» de travailler ensemble.

Le président français a dit pour sa part vouloir une «relation entre la France et l'Allemagne équilibrée et respectueuse de nos sensibilités politiques».

M. Hollande s'est dit «prêt à tout mettre sur la table lors du Conseil européen (du 23 mai), y compris les euro-bonds», des obligations communes européennes, jusqu'ici un tabou pour Berlin.

Il a aussi maintenu qu'il voulait renégocier le pacte budgétaire, censé durcir la discipline budgétaire en Europe, pour y adjoindre un volet croissance, ce à quoi Mme Merkel s'est jusqu'ici opposée fermement.

La chancelière a assuré qu'il y avait «des points d'accord» avec M. Hollande sur la croissance, reconnaissant qu'il s'agissait d'un «concept général» qui pouvait recouvrir différents types de mesures, et admettant «des signes de divergences».

Les positions pourraient néanmoins être plus proches qu'il ne semble. Lundi, le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, a assuré que croissance et assainissement budgétaire n'étaient pas contradictoires.

Le temps presse, car seule l'Allemagne, avec une modeste croissance de 0,5%, échappe encore au marasme général. La France est à l'image de la zone euro avec, elle aussi, une croissance nulle au premier trimestre 2012.

L'Italie s'enfonce en revanche dans la récession avec -0,87% au premier trimestre, un résultat pire que celui attendu par les analystes. Mais c'est encore une fois la Grèce qui a connu la dégradation la plus sensible de son produit intérieur brut (PIB), avec un recul de 6,2% au premier trimestre.

En 2011, le PIB grec avait déjà reculé de 6,9%, et rien ne semble pouvoir arrêter la longue descente aux enfers que connaît la Grèce.

Athènes est toutefois parvenu à lever mardi 1,3 milliard d'euros en bons du Trésor à trois mois, à un taux de 4,34%, en hausse par rapport à celui de 4,20% consenti au moment de la dernière adjudication du même type, le 17 avril.