Sous le signe de l'austérité et sur fond de crise du modèle social européen, les traditionnels défilés du 1er mai ont commencé mardi dans toute l'Europe, comme en Espagne qui vit une «fête du Travail» morose, avec un taux de chômage record.

Sous le mot d'ordre «Travail, dignité, droits. Ils veulent tout détruire», des dizaines de milliers de manifestants ont parcouru le centre de Madrid en agitant des petits drapeaux rouges, répondant à l'appel des deux principaux syndicats espagnols, UGT et CCOO.

En ligne de mire des plus de 100 000 manifestants qui ont défilé dans environ 80 villes d'Espagne: les coupes budgétaires et la réforme du travail adoptée en février par le gouvernement conservateur.

«Nouvelle réforme du travail: vers un monde d'esclaves», proclamait une grande banderole affichée vers le départ du défilé.

«J'ai deux filles au chômage: ils ont licencié les jeunes qui avaient du travail», se désole l'une des manifestantes, Josefa Martinez Fernandez, 51 ans.

«J'ai à peine de quoi travailler», renchérit Lorenzo Martin Ribera, 65 ans, propriétaire d'une imprimerie.

Introduite pour relancer un marché du travail sinistré depuis l'explosion de la bulle immobilière en 2008, la réforme est loin d'avoir fait ses preuves: l'Espagne a pulvérisé vendredi un nouveau record de chômage dans les pays industrialisés, avec un actif sur quatre (24,4%) sans emploi.

Dans une Grèce frappée par une politique de rigueur encore plus sévère, imposée par ses créanciers, des milliers de personnes, en majorité des militants communistes, ont participé aux manifestations à Athènes et dans d'autres villes. Selon la police, plus de 18 000 personnes ont manifesté dans tout le pays.

«Personne seule, tous ensemble on va y arriver», proclamait la principale banderole dressée derrière la tribune installée sur la place Kotzia, dans le centre d'Athènes.

«À bas la justice des marchés», «Sanctionnez les partis de la rigueur», pouvait-on lire sur d'autres banderoles.

Ces défilés interviennent à cinq jours des élections législatives du 6 mai, dont le résultat est incertain en raison de la baisse de popularité des deux principaux partis, la Nouvelle-Démocratie (droite), partant favori, et les socialistes du Pasok, sanctionnés pour la politique d'austérité.

En France, syndicalistes, militants de gauche, partisans de Nicolas Sarkozy et activistes du Front national de Marine Le Pen sont tous descendus dans la rue pour un 1er mai également très politique, à cinq jours de la présidentielle.

A l'appel des deux grandes centrales, la CGT et la CFDT, et de trois autres -Unsa, FSU et Solidaires-, les salariés devaient participer à 289 défilés.

Scandant les slogans «Ni droite ni gauche, bleu marine» et «Bleu blanc rouge, la France aux Français», des milliers de participants formaient le cortège du Front national (extrême droite), qui a commencé à Paris en milieu de matinée.

À Istanbul, des dizaines de milliers de manifestants venant de tous bords politiques ont convergé vers la place Taksim, sur la rive européenne de la métropole, où des dizaines de personnes avaient été tuées il y a 35 ans.

Selon les chiffres officiels, 20 000 policiers ont été mobilisés pour assurer la sécurité du rassemblement sur cette place. La plus connue d'Istanbul, elle avait été rouverte aux manifestants le 1er mai 2010, après avoir été interdite depuis le 1er mai 1977, lorsque des inconnus avaient ouvert le feu sur la foule.