L'ancien pasteur Joachim Gauck a été largement élu dimanche président de la République allemande, devenant la première personnalité d'ex-RDA à occuper ce poste essentiellement honorifique.

Avec la chancelière Angela Merkel, et désormais M. Gauck, l'Allemagne est dirigée par deux personnalités ayant vécu derrière le Rideau de fer jusqu'à la réunification du pays.

Joachim Gauck, ancien militant des droits de l'Homme à la fin de la RDA, jouit d'un immense respect en Allemagne. Il a été plébiscité en obtenant 991 voix au sein de l'Assemblée fédérale, dont les 1240 membres étaient chargés d'élire le nouveau président.

«Quel beau dimanche!», s'est-il exclamé quelques minutes après être devenu le 11e président de la République fédérale.

Dans une brève allocution, il a commencé par rappeler qu'il y a 22 ans jour pour jour avaient eu lieu les premières et dernières élections libres de RDA, quelques mois avant la Réunification allemande du 3 octobre 1990. «Je n'oublierai jamais ces élections. Jamais!», a-t-il dit, visiblement ému.

«Vous avez élu un président qui ne peut pas penser sans l'idée de liberté» en lui, a-t-il ajouté.

«Je dirai 'oui' de tout mon coeur et de toutes mes forces à la responsabilité que vous m'avez accordée aujourd'hui», a-t-il poursuivi.

Cet homme, qui a supervisé pendant dix ans les archives de la Stasi, la police politique d'Allemagne de l'Est, après la chute du Mur de Berlin, a été salué par la chancelière Angela Merkel dans l'enceinte du Bundestag (chambre basse du Parlement), où se déroulait cette élection. Il a ensuite été longuement applaudi par l'Assemblée.

«Je me réjouis de ce résultat», a souligné la chancelière sur la chaîne de télévision publique ZDF, affirmant qu'il avait «en tête l'intérêt des citoyens».

Le président est désigné pour cinq ans par les 620 députés et autant de représentants des États régionaux.

Mme Merkel a soutenu M. Gauck bien qu'il ne soit membre d'aucun parti politique. Tous deux incarnent la «génération 89» qui a entamé sa carrière politique dans le sillage de la chute du Mur, le 9 novembre 1989.

Seule autre candidate en lice, la «chasseuse de nazis» Beate Klarsfeld, 73 ans, soutenue par la seule gauche radicale, Die Linke, partait battue d'avance. Elle n'a obtenu que 126 voix. Les principaux partis représentés au Bundestag, l'Union démocrate-chrétienne (CDU), les libéraux du FDP, les sociaux-démocrates du SPD et les Verts, s'étaient mis d'accord pour soutenir M. Gauck dans ce scrutin anticipé.

Le 17 février, le président Christian Wulff (conservateur) avait démissionné après plusieurs semaines de scandale lié à son implication présumée dans des affaires de corruption. Sa démission après seulement 20 mois de mandat, après la démission de son prédécesseur, a écorné l'image de la fonction présidentielle.

Le scrutin de dimanche était chargé de symboles historiques. Si Joachim Gauck représente la révolte des Allemands de l'Est contre le régime communiste, Beate Klarsfeld incarne la chasse aux criminels nazis après la Guerre. Elle était devenue célèbre en 1968 en giflant le chancelier Kurt Georg Kiesinger, ancien membre du parti national-socialiste.

Cette Allemande, qui vit depuis longtemps en France, avait indiqué venir dimanche accompagnée de représentants de l'Association des fils et filles de déportés juifs de France qu'elle a créée avec son époux, Serge.

Joachim Gauck, qui n'est pas divorcé de son épouse bien qu'il vive depuis plus de vingt ans séparé, avait échoué en 2010 à devenir président.