Le tribunal d'Oslo a condamné lundi deux hommes accusés d'avoir préparé en lien avec Al-Qaïda un attentat contre le journal danois qui avait publié les caricatures controversées de Mahomet en 2005.

C'est la première fois que la justice norvégienne prononce une condamnation pour «complot en vue de commettre un acte terroriste».

Reconnu comme étant le cerveau du projet, Mikael Davud, Norvégien d'origine ouïghoure, a été condamné à sept ans de prison tandis que son complice, le Kurde irakien Shawan Sadek Saeed Bujak, a écopé de trois ans et demi de prison.

Les deux hommes ont été reconnus coupables d'avoir projeté une attaque à l'explosif contre les locaux du quotidien Jyllands-Posten, qui avait provoqué de violentes manifestations dans le monde musulman en publiant des dessins du prophète Mahomet, dont la représentation est interdite.

Les peines prononcées sont inférieures à celles requises par le procureur, à savoir 11 ans contre Davud et cinq ans contre Bajuk.

Les avocats des deux hommes ont indiqué qu'ils allaient leur conseiller de faire appel.

Un troisième suspect, l'Ouzbek David Jakobsen, 33 ans, a été acquitté des charges les plus graves mais s'est vu condamné à quatre mois de prison pour avoir aidé ses co-accusés à se procurer des composants nécessaires à la fabrication d'explosifs.

«Il ne fait aucun doute que c'était Davud qui a pris l'initiative des préparatifs en vue d'un acte terroriste et qui était l'homme central», ont estimé les trois juges dans leur verdict.

«La Cour considère aussi que c'est lui-même qui devait perpétrer l'attentat terroriste», ont-ils ajouté.

Le tribunal a également estimé que Davud, petit barbu de 40 ans, avait «indubitablement comploté, consciemment et volontairement, avec Al-Qaïda» en vue d'attaquer Jyllands-Posten.

Selon le service norvégien de renseignement intérieur (PST) qui avait placé le suspect sous étroite surveillance, la mouvance islamiste l'a notamment formé à la confection et au maniement d'explosifs dans un camp au Pakistan.

«Il n'exclut pas d'avoir pu entrer en contact avec des membres ou des sympathisants d'Al-Qaïda dans l'élaboration de son projet», a déclaré l'avocat de Davud, Carl Rieber-Mohn, à l'AFP.

«Mais il a refusé toute condition attachée à l'aide apportée et nie tout accord avec Al-Qaïda», a-t-il ajouté.

Issu d'une minorité opprimée en Chine, Davud reconnaît avoir planifié une attaque mais affirme qu'elle visait des intérêts chinois en Norvège, et non pas Jyllands-Posten.

Il dit avoir agi à des fins purement personnelles et avoir manipulé les deux autres pour qu'ils l'aident, à leur insu, à se procurer des produits chimiques, notamment du péroxyde d'hydrogène, en vue de fabriquer une bombe.

En Norvège, une condamnation pour «complot en vue de commettre un acte terroriste» ne peut être prononcée que pour des actes ou des projets perpétrés ou ourdis par plusieurs individus.

Âgé de 39 ans, Bujak, lui, admettait avoir évoqué avec Davud la possibilité d'une action punitive contre Jyllands-Posten et Kurt Westergaard, tout en affirmant qu'il ne s'agissait que de vagues propos ne tombant pas sous le coup de la loi.

«Bujak a aidé Davud dans ses préparatifs (...) et il ne fait aucun doute qu'il a été fortement impliqué», ont dit les juges, qui ont toutefois accordé foi à ses affirmations selon lesquelles il n'envisageait pas de participer à l'attentat lui-même et qu'il n'avait pas connaissance de liens avec Al-Qaïda.

Faut de preuves suffisantes, le tribunal a en revanche acquitté Davud et Bujak de l'accusation selon laquelle ils avaient voulu abattre Kurt Westergaard, auteur de la caricature la plus controversée représentant le prophète avec un turban en forme de bombe à la mèche allumée.

Quant à Jakobsen, qui a pris contact avec la police de son propre gré en novembre 2009 et qui était le seul des trois à comparaître libre, il niait toute intention de participer à un projet d'attentat.