Si le plus récent épisode opposant le Parti socialiste et les partisans du président Nicolas Sarkozy constitue une indication des choses à venir, la campagne présidentielle qui s'annonce en France risque d'être plus riche en injures qu'en débats de fond.

L'inquiétude est partagée par plusieurs analystes français qui voient d'un mauvais oeil « la tempête dans un verre d'eau » suscitée cette semaine par des propos attribués au candidat socialiste François Hollande.

Le quotidien Le Parisien a indiqué mercredi que le favori des sondages avait traité le chef de l'État de « sale mec » lors d'une rencontre à micros fermés tenue avec des journalistes il y a quelques jours.

Plusieurs participants à la rencontre sont intervenus par la suite pour préciser que M. Hollande s'était placé fictivement dans la peau de Nicolas Sarkozy lorsqu'il a utilisé cette expression et pastichait ses propos.

Ces précisions n'ont pas freiné l'ardeur des membres de l'UMP, parti de la majorité, et du gouvernement qui ont multiplié les interventions dans les médias pour fustiger l'intervention alléguée du candidat socialiste.

La ministre Nadine Morano a exigé « des excuses publiques à l'encontre du chef de l'État » en alléguant que la sortie de François Hollande le « disqualifiait de la course à l'Élysée ».

« La démocratie ne s'accommode ni de l'injure ni du dénigrement. Quand on aspire aux plus hautes fonctions de l'État, la moindre des qualités est le sang-froid et la sérénité. M. Hollande vient de démontrer qu'il ne possède aucun des deux », a ajouté Valérie Rosso-Debord, déléguée générale adjointe de l'UMP.

Le Parti socialiste a rétorqué en accusant la droite de se livrer à une « manipulation grossière » pour tenter de discréditer le candidat de la formation.

Une tentative « particulièrement malvenue de la part d'un parti dont le président s'est caractérisé ces dernières années par une véritable vulgarité », a déclaré la porte-parole de François Hollande, Najat Vallaud-Belkacem, en rappelant l'épisode où le chef d'État avait lancé « casse-toi, pauv' con » à un homme qui refusait de lui serrer la main.

Stratégie du désespoir

Le candidat socialiste a ajouté qu'il « n'accepte pas les polémiques incessantes venant de l'UMP » et préférait laisser la vulgarité « aux autres » en allusion à la droite.

Selon Le Monde, « l'affaire du sale mec » est un cas d'école de la « riposte systémique » et structurée que l'UMP entend apporter à toutes les sorties socialistes. « Tout est fait à la demande du président. Nous sommes missionnés par Nicolas Sarkozy pour taper sur François Hollande. Le but est de l'affaiblir avant que M. Sarkozy se déclare », a déclaré un ministre non identifié au quotidien.

Le chroniqueur média Daniel Schneiderman croit voir dans la stratégie de la droite une marque de « désespoir » face aux sondages, qui continuent de prédire une large victoire socialiste au second tour du scrutin présidentiel.

« Tout se passe comme si les aboyeurs du pouvoir, et leur commanditaire évident, avaient désormais intégré l'inéluctable défaite et n'avaient plus d'autres solutions que de tenter des sorties désespérées », a écrit l'analyste, qui s'alarme du fait que les médias sociaux et les chaînes d'information en continu constituent un relais idéal pour ce type de « stratégie de saturation ».