Le gouvernement français, qui ne manque normalement pas une occasion de souligner sa volonté de restreindre l'immigration au pays, a lâché un peu de lest hier en révisant la portée d'une circulaire pénalisant les étudiants étrangers.

Le ministre de l'Enseignement supérieur, Laurent Wauquiez, a expliqué en entrevue radiophonique que des instructions précises seraient acheminées prochainement aux préfets pour éviter de nouveaux «malentendus».

La circulaire émise l'année dernière pour réguler l'immigration professionnelle demandait notamment aux hauts fonctionnaires de traiter «avec rigueur» les demandes d'autorisation de travail présentées par les étudiants étrangers en voie d'achever leur formation.

Un collectif s'était formé au cours des derniers mois pour dénoncer la mesure, qui a forcé des centaines d'étudiants étrangers ayant reçu des offres d'emploi dans le pays à plier bagage. Des ressortissants québécois ont notamment été touchés.

Plusieurs dirigeants du milieu universitaire et du monde professionnel français ont critiqué son impact. Le Parti socialiste avait aussi fustigé le gouvernement à ce sujet au cours des dernières semaines en relevant que la circulaire «pénalisait fortement» étudiants et entreprises.

Le gouvernement affirme aujourd'hui qu'il veut garantir que la «nécessaire maîtrise de l'immigration professionnelle» ne se fera pas «au détriment de l'attractivité du système d'enseignement supérieur, ni des besoins de certaines de nos entreprises en compétences spécifiques de haut niveau». Le ministre Wauquiez a prévenu que les nouvelles instructions ne profiteraient à ce titre qu'aux étudiants à «haut potentiel». Le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, qui est responsable de la politique d'immigration, a rencontré hier après-midi les représentants des universités et des grandes écoles du pays pour détailler la révision envisagée.

L'organisation France terre d'asile, qui réclamait l'annulation pure et simple de la circulaire, critique la valse-hésitation du gouvernement par rapport aux étudiants étrangers. Au dire de son directeur général, Pierre Henry, le président Nicolas Sarkozy et son entourage se trouvent piégés entre la nécessité de protéger la compétitivité des universités et des entreprises du pays et la «course poursuite» menée avec le Front national pour séduire l'électorat d'extrême droite en prévision du scrutin présidentiel d'avril.

Accès à la nationalité

En plus de resserrer les règles en matière d'immigration professionnelle, le ministre de l'Intérieur multiplie depuis un an les mesures compliquant l'accès à la nationalité française tout en intensifiant la lutte contre l'immigration illégale. Claude Guéant, qui se défend de calquer son discours sur celui du Front national, affirme que ces actions sont nécessaires pour tenir compte du fait que le modèle d'intégration français est dans l'impasse.

Il a notamment relevé l'année dernière, en introduisant la circulaire, que le taux de chômage chez les ressortissants non européens vivant en France est largement supérieur au taux national et justifiait un tour de vis permettant de faire chuter «dans un premier temps» le nombre de nouveaux arrivants à 180 000 personnes par année. Le pays en a accueilli près de 190 000 en 2010.

Pierre Henry affirme que l'existence de quartiers défavorisés à forte concentration d'immigrants ne doit pas faire oublier que le système d'intégration français «continue de fonctionner».

«Il ne faut pas prendre la partie pour le tout», prévient-il.